Analyses
Si nous avions su ce que nous savons aujourd’hui
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Global Fixed Income Bulletin
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août 15, 2025
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août 15, 2025
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Si nous avions su ce que nous savons aujourd’hui |
Bilan des marché obligataires mondiaux
Les taux sont repartis à la hausse sous l’effet d’une croissance résiliente et d’une inflation tenace
En juillet, les rendements des emprunts d’État ont augmenté dans la plupart des pays développés, sous l’impulsion de celui des bons du Trésor à 10 ans, qui a augmenté d’environ 15 points de base (pb), à 4,37%, en raison de statistiques économiques plus robustes que prévu et de pressions inflationnistes tenaces. Les fluctuations ont été importantes au Canada et au Japon (+18 pb et +12,5 pb au Japon) et de moindre ampleur en Allemagne et au Royaume-Uni (+9 pb et +8 pb). Tous les rendements ont subi des pressions haussières, sous l’effet de la rhétorique agressive des banques centrales et d’une réévaluation des anticipations relatives aux taux terminaux.
Rebond des marchés du crédit grâce aux facteurs techniques et l’appétence pour le risque
Les spreads de crédit se sont globalement resserrés, soutenus par des fondamentaux solides et la demande. Les spreads des titres américains Investment Grade (IG) se sont resserrés de 7 pb, à 76, tandis que ceux des titres High Yield (HY) américains ont diminué de 12 pb, à 278, avec des mouvements similaires sur le segment des titres IG en euros (-13 pb) et HY en euros (-30 pb). Les spreads des obligations d’entreprises (-26 pb) et des obligations souveraines des marchés émergents (-24 pb) se sont aussi nettement contractés, une tendance qui reflète l’embellie du sentiment et de la demande.
Surperformance du crédit titrisé
Les rendements des titres adossés à des créances hypothécaires (MBS) émis par des agences ont augmenté de ~14 bps, but spreads tightened modestly, suggesting stable demand. Commercial MBS (CMBS) and Asset-Backed Securities (ABS) spreads narrowed across ratings buckets, with CMBS AAA down ~5 pb et ceux des CMBS notés BBB ont baissé de près de 20 pb, grâce à l’amélioration des fondamentaux et de la configuration technique.
Les points morts augmentent sous l’impulsion du rebond des anticipations d’inflation
Les points morts d’inflation ont augmenté aux États-Unis (+11 pb), en Allemagne (+6 pb) et au Royaume-Uni (+6 pb), ce qui témoigne d’un rebond des anticipations d’inflation à travers le monde. La tendance a été moins marquée au Japon et dans les pays du Sud de l’Europe.
L’appréciation du dollar, source de volatilité sur le marché des changes
Le dollar s’est nettement apprécié, avec des fluctuations marquées contre le yen japonais (-4,5%), l’euro (-3,2%) et la livre sterling (-3,8%). L’indice du dollar (DXY) a progressé d’environ 3,2%, en raison de la remontée des rendements américains et des flux à la recherche de valeur refuge. Les devises des pays émergents ont globalement baissé : le BRL et le ZAR ont respectivement perdu 3% et 2,7%.
Perspectives des marchés obligataires
Compte tenu de l’évolution des marchés obligataires en juillet, les investisseurs semblent estimer que l’économie américaine a bien résisté aux incertitudes suscitées par les droits de douane des trois mois précédents et qu’elle progresse à un rythme régulier, sans pour autant être spectaculaire. Toutefois, les données relatives à l’inflation sous-jacente publiées en juin (IPC et PCE) sont restées obstinément élevées, avec une légère hausse par rapport au mois de mai.
En début de mois, le rapport initial sur les créations d’emplois hors agriculture pour le mois de juin a dépassé les attentes (147 000 contre 106 000 anticipées) et a renforcé la confiance des opérateurs dans la résilience de l’économie. Toutefois, les révisions ultérieures, équivalentes à un ajustement à la baisse de 258 000 sur deux mois, ont montré que la vigueur du marché du travail en mai et juin avait été largement surestimée. Toutefois, les traders ont d’abord considéré que ces données préliminaires témoignaient d’une croissance modérée.
La Fed a maintenu ses taux inchangés comme prévu, mais les dissensions des gouverneurs Bowman et Waller, inquiets de l’état du marché du travail et préconisant une baisse des taux, ont marqué une inflexion importante. En fin de mois, les rendements des bons du Trésor à 10 ans avaient augmenté de 15 pb. Les contrats à terme sur les fonds fédéraux (Fed funds), qui avaient intégré une probabilité de 65% de trois baisses des taux au maximum d’ici la fin de l’année à la fin du mois de juin, ont fini par anticiper fin juillet une probabilité légèrement supérieure à 30% de seulement deux baisses des taux.
Comme chaque été sur les marchés, l’activité a été atone et la liquidité faible. Les spreads de crédit des titres IG et HY sont retombés à leurs plus bas de 2025. Les spreads des actifs titrisés se sont resserrés et l’indice MOVE, un indicateur de la volatilité des bons du Trésor, a clôturé à son plus bas niveau depuis janvier 2022, juste avant le début du cycle de resserrement monétaire de la Fed. Compte tenu de la diminution des anticipations d’assouplissement de la part de la Fed, la courbe des taux s’est aplatie et l’écart de rendement entre des bons du Trésor à 5 ans et 30 ans a diminué de 5 pb.
Les marchés de taux des autres pays du G10 ont suivi les tendances du marché américain. La BCE, la Banque centrale du Japon, la Banque centrale du Canada et la Banque de réserve d’Australie ont laissé leurs taux inchangés, alors que le comité de politique monétaire de la Banque d’Angleterre ne s’est pas réuni. Les rendements à dix ans ont augmenté sur les marchés développés dans le sillage de l’évolution de ceux des bons du Trésor américain.
A l’approche du délai fixé au 1er août par Donald Trump pour les négociations commerciales, la structure des droits de douane a fini par devenir plus claire. Les accords conclus après la pause initiale qui avait suivi le « Liberation Day » prévoient des droits de douane de base de 15% pour les accords commerciaux avec les États-Unis, à l’exception du Royaume-Uni, qui a obtenu une surtaxe de base de 10%. L’UE, le Japon et la Corée du Sud ont accepté des droits de douane de 15% sans droits réciproques sur les marchandises américaines, et se sont engagés à réaliser des centaines de milliards d’investissements sur le territoire américain. Le droits de douane imposés à l’Inde (25%), à la Suisse (39%) et au Brésil (50%) ont fortement augmenté. Le Canada est toujours en négociation et fait actuellement face à des droits de douane de 35% sur les marchandises non conformes à l’ACEUM (« Accord Canada-États-Unis-Mexique »), tandis que le Mexique a bénéficié d’une prolongation de 90 jours pour finaliser son accord.
Selon le Budget Lab de l’Université de Yale, compte tenu des droits de douane supplémentaires sur l’acier, l’aluminium, le cuivre et de la suppression de l’exemption de l’OMC pour les produits pharmaceutiques, le taux effectif moyen des droits de douane sur les importations de marchandises par les États-Unis se monte désormais à 18,3%, contre 2,4% en janvier. Selon les estimations, ces surtaxes ont augmenté les prix à la consommation américains de 1,5%, en tenant compte des effets de substitution. A l’annonce de ces accords commerciaux, les points morts des TIPS du Trésor américain, un indicateur clé des anticipations d’inflation du marché, ont augmenté, les points morts à 5 ans passant de 2,31% début juillet à 2,48% fin de mois.
De nouvelles informations nous ont permis de gagner en visibilité sur une autre initiative de l’administration Trump, à savoir la promulgation de la loi « One Big Beautiful Bill Act » le 4 juillet. La principale préoccupation des marchés obligataires est l’augmentation probable du déficit, qui était déjà élevé, malgré une économie en croissance et proche du plein emploi. Comme nous l’avons déjà indiqué, la dégradation ininterrompue du déficit va selon nous exercer des pressions haussières sur les taux d’intérêt réels sur l’ensemble de la courbe.
Nous avons intitulé nos perspectives mensuelles « Si nous savions su ce que nous savons maintenant », car les mouvements modérés sur les marchés en juillet reposaient sur l’hypothèse d’une croissance économique régulière. Cependant, le rapport sur l’emploi publié le 1er août et les très fortes révisions à la baisse des créations d’emplois des mois précédents ont montré que la situation globale était probablement plus fragile qu’il n’y semblait. Les mois à venir devraient apporter des éclairages intéressants.
Taux et devises des marchés développés
Analyse mensuelle
Les taux d’intérêt des marchés développés ont augmenté lors de la première quinzaine de juillet, avant de diminuer à nouveau au cours de la deuxième quinzaine. Dans l’ensemble, les obligations ont évolué dans une fourchette plus étroite qu’en juin, et les rendements des bons du Trésor américain à 10 ans ont terminé le mois en hausse de 15 pb, à 4,38%. La tendance récente à l’aplatissement de la courbe des taux s’est interrompue, les données publiées en juillet ayant globalement justifié la fermeté de la Fed. Le rapport sur l’emploi du mois de juin a fait état de chiffres solides, le taux de chômage étant retombé de manière inattendue à 4,1%. Le rapport sur l’IPC a montré des pressions sur les prix dans les secteurs des biens affectés par les droits de douane, tandis que d’autres catégories de produits sont ressorties en ligne avec les attentes.
La fenêtre initiale des négociations commerciales fixée par le président Trump a expiré début juillet, mais l’administration américaine a renoncé à imposer de nouveaux droits de douane, prolongeant de fait le délai effectif au début du mois d’août. En fin de mois, les États-Unis ont annoncé des accords commerciaux avec des partenaires clés, dont le Japon, l’UE et la Corée, qui ont obtenu des taux de droits de douane inférieurs en échange d’investissements directs étrangers (IDE) et de concessions d’accès à leurs marchés. Parallèlement, les discussions se sont poursuivies avec la Chine. A l’occasion de la réunion du FOMC, le président de la Fed Jerome Powell a durci son discours lors de la conférence de presse et a fait savoir qu’il n’y avait aucune urgence à réduire les taux compte tenu de l’équilibre actuel du marché du travail.
En dehors des États-Unis, d’autres grands marchés se sont révélés volatils. Les Gilts ont sous-performé en raison des difficultés que pourrait rencontrer le gouvernement travailliste pour réformer le système de protection sociale, et de son recours potentiel à une augmentation de la fiscalité susceptible de peser sur la croissance. La BCE a laissé ses taux inchangés lors de sa réunion de juillet, tout en précisant qu’une dégradation économique importante serait nécessaire pour entraîner un nouvel assouplissement. Les marchés anticipent désormais une seule baisse de taux supplémentaire sur l’ensemble du cycle. Les données d’inflation sont ressorties en ligne avec les attentes, tandis que les indices PMI ont mis en évidence une certaine stabilisation des perspectives. Au Japon, les prévisions de nouvelles hausses des taux ont fait leur retour après l’accord commercial avec Washington, mais la Banque du Japon s’est montrée plus accommodante que prévu lors de sa réunion de juillet.
Sur les marchés des changes, le dollar s’est apprécié par rapport à ses pairs et l’indice Bloomberg Dollar a progressé de 2,6% en juillet. Les taux de change ont été particulièrement volatils lors de la deuxième moitié du mois en raison d’une liquidité plus faible et des pressions exercées sur les positions vendeuses sur le dollar, qui ont été remises en question par des données solides et la fermeté de la Fed. L’euro a notamment perdu du terrain après la confirmation des accords commerciaux, tout comme les actions de la région. Le taux dollar-yen a également franchi le seuil de 150 après la réunion de la Banque du Japon.
Perspectives
Nous avons réduit nos positions longues en duration sur les marchés développés car les données économiques ont montré qu’il n’y avait pas d’urgence à abaisser les taux. Nous maintenons également nos stratégies de longue date anticipant une pentification des courbes de taux des bons du Trésor américain et des Bunds. Nous estimons en effet que le creusement des déficits et l’augmentation des primes de terme pourraient entraîner une sous-performance des parties longues de ces courbes, même en l’absence de baisses de taux importantes. Au Japon, nous restons sous-pondérés en raison d’un solide contexte au niveau des salaires et de l’inflation, qui, selon nous, entraînera plus de hausses que le marché ne l’intègre actuellement. Nous maintenons également nos positions sur les points morts d’inflation. Nous avis pris une position vendeuse sur le dollar américain par rapport à un panier de devises.
Taux et devises des marchés émergents
Analyse mensuelle
La dette des marchés émergents a enregistré une performance mitigée en juillet. Le dollar américain s’est apprécié au cours de la période grâce à des statistiques économiques solides et à une diminution des incertitudes dans le sillage des accords commerciaux conclus par les États-Unis. Les spreads de crédit des emprunts d’État et des obligations d’entreprises se sont resserrés d’un mois sur l’autre, renforçant ainsi la performance de l’indice en devise forte. Les accords commerciaux les plus importants ont été conclus avec l’UE, l’Indonésie et le Japon. Lors des négociations avec l’Inde, les États-Unis ont envisagé des sanctions en raison des achats de pétrole russe par le pays. Parallèlement, les États-Unis ont annoncé des droits de douane de 50% sur le Brésil en raison du procès imminent de l’ancien président Jair Bolsonaro.
Les tensions entre la Russie et l’Ukraine sont restées volatiles, bien que les États-Unis aient renouvelé leur soutien militaire à l’Ukraine et fixé un délai au président Poutine pour qu’il accepte un cessez-le-feu. Les flux d’investissement vers les obligations émergentes en devise locale et devise forte ont été positifs pour le troisième mois consécutif. Après des sorties annuelles record de 2022 à 2024, la classe d’actifs a renoué avec une collecte positive nette en juin.
Perspectives
Les valorisations de la dette émergente restent attractives, en particulier celles des devises et des taux d’intérêt locaux. Les devises émergentes bénéficient toujours d’une amélioration des fondamentaux des pays ainsi que des mesures prises par les États-Unis, qui exercent des pressions baissières sur le dollar américain. Les écarts de rendement réels entre les marchés émergents et développés sont assez importants et devraient bénéficier de la baisse des taux potentielle des banques centrales des pays émergents. Les accords commerciaux passés par les différents pays avec les États-Unis vont probablement réduire les incertitudes macroéconomiques. Bien que les droits de douane ne soient pas aussi élevés et généralisés qu’annoncé initialement en avril, de nombreux pays sont toujours susceptibles de subir des surtaxes élevées qui auront probablement des impacts désinflationnistes. Le Fonds monétaire international a légèrement relevé ses prévisions de croissance mondiale, en raison de droits de douane effectifs américains moins élevés que prévu. L’économie mondiale pourrait toutefois être confrontée à de nombreux obstacles économiques en raison de la poursuite des négociations commerciales et des guerres toujours en cours. Une analyse « bottom-up » des fondamentaux des pays reste indispensable en raison du caractère différencié de la classe d’actifs.
Obligations d’entreprises
Analyse mensuelle
Les actifs risqués ont légèrement progressé en juillet dans le sillage des accords douaniers avec l’UE et le Japon, qui ont rassuré les investisseurs quant à l’indépendance de la Fed et à la résilience des bénéfices des entreprises. Les obligations IG en euro ont surperformé leurs homologues américaines, grâce à une offre de titres moins importante et à des facteurs techniques solides. Plusieurs accords commerciaux ont été conclus au cours du mois, notamment avec le Japon et l’UE. Ils prévoient des droits de douane automobiles moins élevés, un accès élargi aux marchés et la promesse de plus de 1 900 milliards de dollars d’investissements. Le président Trump a également annoncé des progrès avec la Chine et une pression accrue sur les entreprises pharmaceutiques concernant les prix des médicaments. Les banques centrales n’ont pas modifié leur politique monétaire. La BCE a annoncé qu’elle restait dépendante des données, tandis que des dissensions sont apparues au sein de la Fed pour la première fois depuis 1993. Les statistiques économiques ont témoigné d’une légère amélioration : Les indices PMI de la zone euro et les ventes au détail aux États-Unis ont surpris la hausse, et le PIB du 2è trimestre s’est normalisé après une accélération liée aux dépenses effectuées avant l’instauration des droits de douane. L’inflation est restée tenace mais stable. L’indice harmonisé des prix à la consommation de la zone euro s’est maintenu à 2,0% et l’IPC sous-jacent américain a subi des pressions dans les catégories de produits sensibles aux droits de douane. Les bénéfices des entreprises ont globalement bien résisté, sous l’impulsion des banques et des valeurs non-cycliques, mais les secteurs de l’automobile et de la chimie ont quelque peu souffert. L’activité de fusions&acquisitions a repris dans tous les secteurs. Les facteurs techniques sont restés solides, avec des émissions record de 31 milliards d’euros en juillet, sous l’impulsion du secteur financier, et une collecte solide sur le segment du crédit IG.
Les marchés américain et mondial High Yield ont enregistré une performance modeste. Les États-Unis ont fait des progrès mitigés dans leurs négociations commerciales, la croissance du PIB du 2è trimestre a dépassé les attentes et les premiers résultats des entreprises ont fait état d’une résilience constante. L’activité s’est accélérée sur les marchés financiers et les émissions brutes d’obligations High Yield américaines ont enregistré un record annuel. Les prix sur les marchés des prêts à effet de levier ont également beaucoup évolué. Les segments de qualité inférieure ont globalement surperformé sous l’effet de l’appétence pour le risque et d’une hausse de 17 pb des rendements des bons du Trésor à 5 ans, ce qui a pesé sur les obligations notées BB1.
A l’image des autres actifs risqués, les obligations convertibles mondiales ont enregistré de bonnes performances. Malgré les avancées mitigées des négociations commerciales américaines, les bénéfices sont restés solides au 2è trimestre. Les obligations convertibles mondiales ont surperformé les actions et les obligations mondiales. Malgré un mois globalement calme, l’activité a été dynamique sur le marché primaire, avec 11,4 milliards de dollars d’émissions, le total le plus élevé depuis juillet 2007 et 2,5 fois la moyenne historique. Les émissions ont été dopées par le marché américain et, dans une moindre proportion, par l’Asie et le Japon. A l’inverse, l’Europe n’a enregistré aucune nouvelle émission. Depuis le début de l’année, l’offre nouvelle a atteint 82 milliards de dollars, soit 18% de moins qu’à la même période en 2024.2
Perspectives
Nous restons prudemment optimistes à l’égard du crédit et anticipons une croissance atone mais sans augmentation marquée du risque de dégradation des notations ou de défaut. Les politiques européennes restent favorables, alors que les perspectives budgétaires américaines sont plus mitigées. Les fondamentaux des entreprises sont solides, celles-ci maintenant des stratégies faiblement risquées. Les facteurs techniques sont favorables, avec des niveaux d’émissions gérables et une forte demande en faveur des rendements des obligations IG. Le portage devrait rester un facteur majeur de performance, mais nous sommes conscients de l’extrême faiblesse actuelle des spreads de crédit. Comme l’impact des politiques commerciales récemment annoncées ne s’est pas encore totalement matérialisé, nous conservons des expositions ciblées au crédit. Nous privilégions les émetteurs présentant des fondamentaux solides, un faible degré de cyclicité et susceptibles de bénéficier d’une croissance modérée. L’incidence de l’augmentation des droits de douane mondiaux n’étant pas connue, les perspectives de croissance demeurent incertaines. Dans ce contexte, il y a peu de chances que les spreads se resserrent de manière significative.
Nous restons prudents quant au crédit High Yield en ce début de troisième trimestre. Le risque et la volatilité résultant de l’évolution de la politique commerciale font probablement partie du passé, mais les modalités finales des échanges commerciaux des États-Unis avec ses principaux partenaires demeurent incertaines. Nous pensons que l’évolution de la situation commerciale va continuer à peser sur la croissance et alimenter les pressions inflationnistes. Les rendements restent attractifs d’un point de vue historique, mais les spreads High Yield sont serrés et vulnérables au moindre élargissement. Notre prudence est le fruit d’une analyse exhaustive de la croissance américaine et mondiale, des politique des banques centrales, de la situation financière des ménages, des fondamentaux des émetteurs, des données techniques et des valorisations. Le risque de récession nous semble faible cette année, mais nous anticipons de nouveaux épisodes de volatilité.
Nous restons optimistes à l’égard des fondamentaux du marché mondial des obligations convertibles. Ces dernières conservent leurs profils asymétriques, avec des deltas équilibrés et des planchers obligataires solides. Le pic de volatilité déclenché par les tensions commerciales est derrière nous, mais la structure à long terme du commerce mondial demeure incertaine. Les tensions se sont atténuées au Moyen-Orient, mais la viabilité du cessez-le-feu doit encore être confirmée. Le plancher obligataire sera particulièrement précieux si la volatilité remonte, comme ce fut le cas au 2è trimestre. Malgré notre optimisme à l’égard des fondamentaux, nous sommes prudents vis-à-vis du marché primaire, qui est sur le point de dépasser le total des émissions de 2024. La plupart des émetteurs refinancent leur dette arrivant à échéance dans un environnement de taux élevés, mais l’essor des émissions liées aux cryptomonnaies, qui permettent aux entreprises d’émettre de la dette pour acheter des cryptomonnaies, exige une grande prudence. Cette tendance offre toutefois des opportunités aux équipes de gestion disposant de ressources suffisantes et adeptes d’une recherche fondamentale « bottom-up ».
Actifs titrisés
Analyse mensuelle
Les spreads des MBS d’agences se sont encore resserrés de 2 pb, à +145 pb, par rapport aux bons du Trésor de même duration. Malgré ce resserrement, ils restent historiquement élevés et relativement bon marché par rapport aux autres segments obligataires. La Fed a réduit ses positions en MBS de 19 milliards de dollars à 2 120 milliards de dollars, soit une baisse de 583 milliards de dollars par rapport au pic de 2022. Les positions des banques sont restées inchangées à 2 683 milliards de dollars, même si la demande devrait augmenter grâce à l’assouplissement potentiel du ratio de levier supplémentaire (SLR) et à une baisse des taux courts.3 Les sociétés de gestion d’actifs, attirées par des valorisations attractives, restent les principaux acheteurs. L’indice des MBS d’agences a enregistré une performance de -0,41% en juillet, en ligne avec celle des bons du Trésor sur une base ajustée de la duration, mais il les sous-performe encore de 62 pb depuis le début de l’année. Le rendement courant des MBS d’agences a augmenté et atteint 5,18%, tandis que les taux des crédits immobiliers à 30 ans sont retombés à 6,72%. Dans ce contexte, il n’y a aucune intérêt pour la plupart des détenteurs de crédits immobiliers à chercher un refinancement.
Les différents segments du crédit titrisé ont vu leurs spreads se resserrer légèrement et ont sous-performé les obligations d’entreprises, dont les spreads se sont davantage contractés. Les émissions sont restées dynamiques et ont été bien absorbées : Les émissions d’ABS ont atteint 41,12 milliards de dollars, celles de CMBS 13,3 milliards de dollars (+45% en glissement annuel) et celles de RMBS 13,6 milliards de dollars (-17% par rapport au mois de juin).4 Les spreads des RMBS non émis par des agences se sont resserrés de 5 à 10 pb grâce à des fondamentaux solides : faibles défauts de paiement, valeur élevée du patrimoine immobilier des propriétaires et stabilité des prix des logements, malgré une offre limitée et des taux élevés. Les spreads des ABS se sont également resserrés de 5 à 10 pb, mais l’augmentation des défauts sur les crédits à la consommation, en particulier chez les emprunteurs à faibles revenu, est de plus en plus préoccupante. Les spreads de CMBS ont suivi la même trajectoire, avec une certaine vigueur sur les segments des appartements haut de gamme, de la logistique et des hôtels de luxe, tandis que l’immobilier de bureau de 2è catégorie (Class B) est toujours en difficulté. Les conséquences des droits de douane sur les hôtels et les actifs commerciaux sont étroitement surveillées.
Perspectives
Nous prévoyons une poursuite de la contraction des spreads des MBS d’agences aux États-Unis au second semestre. Ces titres devraient bénéficier des flux de capitaux des arbitragistes et des banques en quête de profils de performance plus attractifs que ceux des principaux segments obligataires et du marché monétaire. Ce resserrement devrait toutefois se concrétiser de manière plus marquée une fois que la Réserve fédérale aura commencé à baisser les taux, probablement au quatrième trimestre. Avec des valorisations toujours attractives par rapport à celles des obligations d’entreprises IG et aux moyennes historiques, les MBS d’agences ont toutes les chances de voir leurs performances s’améliorer.
Les spreads de crédit titrisés devraient continuer à évoluer dans une fourchette étroite à court terme, dans l’attente d’une visibilité accrue sur les implications économiques des droits de douane et d’un éventuel resserrement des spreads des MBS d’agences. Si les MBS d’agences sous-performent les émissions d’entreprises depuis le début de l’année, le crédit titrisé surperforme la plupart des segments IG grâce à un portage plus élevé. Nous pensons que les performances vont désormais être essentiellement générées par le revenu des flux de trésorerie, à la faveur des rendements attractifs observés début août. Néanmoins, les taux élevés continuent de mettre la pression sur la situation financière des ménages, ce qui se répercutera tout particulièrement sur les ABS de crédit à la consommation liés à des emprunteurs à faibles revenus. L’immobilier commercial est également en difficulté en raison des coûts de financement actuels.
Les RMBS restent notre segment favori car leurs performances devraient être soutenues par des fondamentaux solides, à savoir de faibles taux de défaut, la valeur élevée du patrimoine immobilier des propriétaires et la stabilité du marché de l’emploi. C’est le seul segment sur lequel nous n’hésitons pas à descendre sur le spectre du crédit. En revanche, nous restons prudents vis-à-vis des ABS et CMBS moins bien notés, qui sont plus susceptibles de connaître des tensions. Dans l’ensemble, nous restons optimistes vis-à-vis des MBS d’agences et certains segment du crédit titrisé et nous nous appuierons sur le portage et la qualité du crédit pour générer des performances dans les mois à venir.