Analyses
Le dilemme des 40 %
|
|
Global Fixed Income Bulletin
|
• |
novembre 17, 2025
|
|
novembre 17, 2025
|
Le dilemme des 40 % |
Le 1er octobre, le gouvernement américain s’est retrouvé en situation d’impasse budgétaire (« shutdown »), qui a perduré jusqu’en novembre. Outre son impact immédiat sur l'activité économique, la principale victime a été l'information : le flux de données dont les marchés et les responsables politiques ont besoin pour évaluer la santé de l'économie a été largement interrompu.
S’agissant des trois piliers sur lesquels les investisseurs s’appuient pour évaluer les conditions aux États-Unis, à savoir l’emploi, l’inflation et la confiance des entreprises, seule la moitié des indicateurs habituels a été publiée. Le Bureau of Labor Statistics (BLS) n’a jamais publié son rapport sur l’emploi, et le Bureau of Economic Analysis a retardé la publication des données sur l’IPP, l’IPC et le PIB. L’indice des prix à la consommation n’a été publié que parce qu’une petite équipe du BLS a finalisé, avant le shutdown, les données nécessaires pour indexer les prestations de la Sécurité sociale. Les enquêtes de conjoncture réalisées par l'Institute for Supply Management (ISM) figuraient parmi les rares données importantes à parvenir aux investisseurs dans les délais.
Malgré cette pénurie de données, les marchés ont continué à fonctionner, tout comme la Réserve fédérale, qui a dû composer avec le même manque d'informations. La Fed a procédé à une deuxième baisse consécutive de ses taux directeurs de 25 points de base, abaissant la fourchette cible à 3,75 %-4,00 %. Pourtant, son président Jerome Powell s’est montré particulièrement prudent, tempérant les anticipations d'un nouvel assouplissement à court terme et provoquant un bref retournement de la tendance haussière des bons du Trésor qui avait précédé la réunion du FOMC du 29 octobre. Malgré cela, les rendements à 10 ans ont clôturé le mois en baisse de 7 points de base (pdb), et la courbe s’est légèrement aplatie.
Le shutdown n’étant toujours pas réglé à la fin du mois, les perspectives sont devenues plus incertaines. La justification de l'assouplissement monétaire par la Fed repose sur une hypothèse de ralentissement du marché du travail, désormais difficile à vérifier. L'inflation, bien que plus faible dans la publication tardive de l'IPC, demeure supérieure à l'objectif. La banque centrale continue de fonder sa politique monétaire sur ses propres enquêtes et projections, tandis que les indicateurs du secteur privé, tels que les données d'ADP sur l'emploi et celles de Challenger sur les suppressions d'emplois, ne comblent qu'une partie du manque d'informations. En octobre, seules 50 % des données n’ont été rendues disponibles et, compte tenu des actuelles, ce chiffre pourrait tomber se rapprocher de 40 % en novembre. Cela laisserait investisseurs et responsables politiques face à une incertitude sans précédent.
À des moments comme celui-ci, un autre Powell, le général Colin Powell, a prodigué des conseils toujours d'actualité pour la prise de décision en situation d'incertitude :
« Utilisez la formule P = 40 à 70, où P représente la probabilité de succès et les chiffres indiquent le pourcentage d'informations acquises… Une fois que les informations se situent dans la fourchette 40 à 70, fiez-vous à votre intuition ».
C'est un conseil que la Fed et les marchés pourraient trouver de plus en plus pertinent dans les semaines à venir.
Ailleurs, la pénurie d'informations n’a pas posé problème. La plupart des principaux marchés obligataires développés ont évolué dans un contexte accommodant, à l'image des États-Unis, mais à l'exception du Japon, qui poursuit sa politique de resserrement monétaire. La surperformance mondiale du Royaume-Uni, associée au repli des données et au regain de crédibilité budgétaire, a entraîné une baisse de 29 pb du rendement des Gilts à 10 ans. En zone euro, les rendements ont reculé de 8 pb en Allemagne et de 15 pb en Italie, malgré le maintien du taux directeur de la Banque centrale européenne (BCE). Au Canada, la baisse de 25 pb a mis le pays en phase avec la tendance généralisée à l'assouplissement monétaire, même si les autorités ont laissé entendre que le cycle pourrait désormais être terminé.
Un mois d’octobre caractérisé par la pénurie de données ; la Fed abaisse ses taux dans un contexte d’incertitude
La paralysie des services de l'administration américaine a créé un déficit historique de données, plongeant les marchés et les décideurs politiques dans l'incertitude. La Fed a néanmoins procédé à la deuxième baisse de 25 pb de ses taux directeurs, bien que le ton prudent du président Powell ait refroidi les anticipations d’un nouvel assouplissement à court terme, la courbe des bons du Trésor s’étant légèrement aplatie.
Stabilité des marchés développés ; divergence des politiques monétaires
Les rendements mondiaux sont restés quasiment inchangés, l’appétit pour le risque initial s’étant estompé après la réunion du FOMC. La courbe des taux américaine s’est pentifiée, tandis que la BCE, la Banque d’Angleterre et la Banque du Canada ont maintenu leur politique monétaire inchangée malgré des indicateurs économiques moins bien orientés. La dégradation de la note de la France et la surperformance des Gilts britanniques ont mis en évidence les contrastes régionaux ; la nouvelle direction du PLD au Japon a alimenté une brève volatilité avant que la situation ne se stabilise.
Les marchés émergents progressent tant pour la dette en devises fortes que pour celle en devises locales
La dette des marchés émergents (EM) a enregistré des performances positives, soutenues par un resserrement des spreads et la vigueur des devises locales au Chili, en Indonésie, au Pérou et en Afrique du Sud. Les flux entrants sont restés solides à 4,6 Mds $ au cours du mois,1 tandis que les élections en Argentine et la trêve commerciale entre les États-Unis et la Chine ont permis de stabiliser le sentiment.
Crédit aux entreprises mitigé ; bénéfices résilients malgré une offre abondante
Les spreads des obligations Investment Grade se sont légèrement élargis, alors que les émissions américaines ont fortement augmenté sous l’effet de l’offre liée à l’IA et aux dépenses d’investissement, tandis que l’Europe a surperformé. Le High Yield a reculé face à la volatilité et aux inquiétudes croissantes des consommateurs, malgré des bénéfices globalement solides. Les obligations convertibles ont continué de profiter de l'essor de l'IA, leurs émissions atteignant des niveaux records.
Les actifs titrisés et les obligations municipales surperforment grâce à des facteurs techniques favorables
Les titres adossés à des créances hypothécaires (MBS) d’agences et le crédit titrisé se sont légèrement resserrés, surperformant les obligations d'entreprises grâce à des fondamentaux solides. Le crédit résidentiel a généré des gains tandis que les ABS et les CMBS sont restés stables.
Les obligations municipales imposables ont progressé de 1,08 %, soutenues par une offre modérée, un crédit stable et une demande institutionnelle persistante.2
Perspectives des marchés obligataires
Suite à la deuxième baisse consécutive de 25 points de base des taux directeurs de la Fed en octobre, les marchés obligataires mondiaux entrent dans une phase plus incertaine. Compte tenu du durcissement de ton du président Jerome Powell, qui a tempéré les anticipations d’assouplissement à court terme, et du report des principales statistiques économiques en raison de la paralysie des administrations américaines, la visibilité en matière de croissance et d’inflation est très limitée. La Fed et les marchés financiers doivent désormais composer avec des informations partielles, ce qui augmente le potentiel de volatilité à court terme et renforce le besoin de flexibilité et de sélectivité au sein des portefeuilles.
À l’échelle mondiale, la plupart des marchés obligataires des pays développés ont adopté un biais plus accommodant, dans le sillage des États-Unis, tandis que le Japon reste sur une trajectoire progressive de durcissement. Le marché britannique a surperformé grâce à la crédibilité accrue de sa politique budgétaire et à la légère détérioration des statistiques, alors que les rendements en zone euro ont baissé après le statu quo de la BCE. La baisse de 25 pb du taux directeur canadien s'inscrit dans le cycle général d'assouplissement monétaire, même si les responsables ont laissé entendre qu'une pause était à prévoir. Ces divergences entre les politiques monétaires plaident en faveur du maintien d'une duration neutre dans l'ensemble, avec des positions sélectives visant à accentuer la pente de la courbe et des opportunités régionales de valeur relative, en particulier en Australie et au Canada.
Les marchés du crédit continuent de bénéficier de fondamentaux solides, même si les valorisations tendues et l'augmentation des émissions plaident en faveur d'une approche sélective. Le crédit Investment Grade offre un portage stable et un risque de dégradation limité, tandis que les valorisations High Yield restent élevées, mais soutenues par de solides bénéfices. Les produits titrisés restent attractifs compte tenu de la solide performance des garanties et des facteurs techniques favorables – en particulier pour les MBS d’agences et le crédit hypothécaire résidentiel – bien que la prudence soit de mise pour les ABS de prêts à la consommation et certains sous-secteurs des CMBS. Les marchés émergents restent attrayants compte tenu de leurs rendements réels élevés et d’une dynamique alimentée par les réformes, tandis que la différenciation au niveau des pays restera essentielle. Les obligations municipales imposables continuent d'offrir une prime de rendement intéressante par rapport aux bons du Trésor et aux obligations d'entreprises, soutenues par une offre modérée et une demande institutionnelle saine. Malgré des spreads resserrés, les prêts bancaires génèrent un revenu intéressant sous l’effet d’une demande soutenue des CLO et d’une offre nouvelle limitée. En dépit de prix en hausse, les titres ne devraient pas dépasser leur valeur intrinsèque sur fond de volatilité toujours élevée et d’incertitude macroéconomique.
Globalement, le portage et la génération de revenus devraient rester les principaux moteurs de la performance des titres obligataires jusqu'à la fin de l'année. Avec une visibilité politique réduite, une sélection rigoureuse des titres, une diversification sectorielle et un accent sur la qualité seront essentiels pour accompagner les investisseurs vers 2026.
Taux et devises des marchés développés
Analyse mensuelle
Les taux d'intérêt des marchés développés ont chuté début octobre avant de repartir à la hausse en fin de mois. Dans l’ensemble, les rendements à 10 ans sur les principaux marchés ont peu évolué, malgré la persistance de l'aplatissement de la courbe. Au début du mois, nous avons assisté à un regain d’appétit pour le risque, l’accalmie dans la publication des données américaines ayant atténué la volatilité réalisée et implicite. L’IPC retardé de septembre, la seule publication majeure, a révélé un ralentissement de l’inflation, contribuant à propulser l’indice S&P&500 vers de nouveaux records, dans un contexte d'anticipations croissantes d'assouplissement monétaire.
La réunion d’octobre du FOMC a marqué le tournant du mois. La Fed a abaissé ses taux de 25 pb et annoncé son intention de mettre fin au resserrement quantitatif. Toutefois, la posture étonnamment restrictive de Jerome Powell, qui a déclaré qu'une baisse en décembre « n'était pas acquise », a entraîné un réajustement des marchés. Ces derniers estiment désormais à environ deux chances sur trois la probabilité d'une nouvelle baisse en décembre, contre une quasi-certitude une semaine auparavant. Les rendements des bons du Trésor à dix ans ont brièvement chuté en dessous de 4 % avant de rebondir. En fin de mois, les États-Unis ont conclu des accords commerciaux avec des partenaires clé, dont la Chine (après une brève escalade début octobre) et la Corée du Sud.
En Europe, l’attention s’est portée sur la France, où la proposition du Premier ministre Sébastien Lecornu de suspendre la réforme des retraites a permis d’apaiser les tensions. Néanmoins, la dégradation par S&P de la notation souveraine de la France à A+, invoquant des déficits persistants et une fragmentation politique, a renforcé les inquiétudes budgétaires. Dans la zone euro, les indices PMI d'octobre, en particulier en Allemagne, ont rassuré quant à la dynamique de croissance. La BCE a maintenu son taux de dépôt à 2 %, qualifiant sa politique monétaire de « bien adaptée » tout en soulignant sa dépendance aux données dans un contexte d'incertitude persistante.
Au Royaume-Uni, le ralentissement de la croissance des salaires et la baisse de l'inflation alimentaire ont incité les marchés à réévaluer la trajectoire de la Banque d'Angleterre, la probabilité de nouvelles baisses de taux avant la fin de l'année étant en hausse. Les signaux budgétaires envoyés avant le budget d'automne – notamment un engagement renouvelé en faveur de la consolidation – ont contribué à réduire les primes de risque budgétaire et ont soutenu la surperformance des gilts. Le rendement du gilt à 10 ans a chuté de 27 pb au cours du mois.
Au Japon, Sanae Takaichi a remporté une victoire inattendue à la tête du PLD. Les inquiétudes initiales du marché concernant l'expansion budgétaire et la pression sur l'indépendance de la Banque du Japon se sont estompées après la formation d'une nouvelle coalition entre le PLD et Ishin.
Les marchés des changes ont reflété l'évolution des anticipations de la Fed et ses prévisions de fin de mois. Le dollar s’est globalement renforcé dans le sillage de la posture restrictive adoptée par le FOMC, comme en témoigne l’indice Dollar Spot de Bloomberg qui s’est inscrit en hausse de 1,5 %.3 La plupart des principales devises se sont affaiblies par rapport au dollar, tandis que les devises à bêta élevé et les devises des marchés émergents ont généralement sous-performé.
Perspectives
Nous maintenons une position neutre sur la duration des marchés développés hors Japon, tout en conservant des positions sélectives sur différents marchés. Nous restons convaincus que les emprunts d’État australiens présentent un potentiel de valorisation par rapport à leurs homologues néo-zélandais, bien que nous ayons récemment réduit nos positions longues sur la duration canadienne et européenne face au dollar. Aux États-Unis, nous conservons des positions misant sur une pentification de la courbe de rendement des bons du Trésor, mais avons allégé nos positions similaires sur les Bunds. Nous avons également renforcé nos positions sur les points morts d’inflation des TIPS.
Au Japon, nous maintenons des positions longues sur les points morts d’inflation et avons augmenté nos positions courtes sur la duration en anticipation d'une normalisation continue des rendements. Sur le marché des changes, nous maintenons notre position courte sur le dollar par rapport à un panier de devises à bêta élevé, ce qui reflète notre conviction que la récente appréciation du dollar a peu de chances de se maintenir à mesure que les divergences politiques s'estompent.
Taux et devises des marchés émergents
Analyse mensuelle
La dette des marchés émergents a généré des performances positives en octobre, tant en devises fortes qu'en devises locales. Malgré une légère appréciation du dollar, l’indice des devises locales a progressé, soutenu par les gains enregistrés par le peso chilien, la roupie indonésienne, le sol péruvien et le rand sud-africain. Les spreads des emprunts d’État et des obligations d'entreprises se sont resserrés ; la baisse des rendements des bons du Trésor US – suite à la réduction de 25 pb des taux directeurs de la Fed – a contribué à ce contexte favorable. En Argentine, les élections de mi-mandat ont abouti à une victoire décisive du parti de Javier Milei, renforçant ainsi son mandat politique. Parallèlement, les États-Unis et la Chine sont parvenus à un accord commercial en vertu duquel les États-Unis ont réduit leurs droits de douane moyens à 47 %, et la Chine s'est engagée à accroître ses importations de soja, à suspendre les restrictions à l'exportation de terres rares pendant un an et à imposer des contrôles plus stricts sur le trafic de fentanyl. Cette classe d'actifs a continué d'afficher une forte demande, enregistrant des entrées nettes de 4,6 Mds $ en octobre, dont 1,7 Mds dans les fonds en devises fortes et 2,9 Mds dans les fonds en monnaie locale4.
Perspectives
Les fondamentaux des marchés émergents restent solides, soutenus par les efforts de réforme en cours dans de nombreux pays et, de manière générale, par des équilibres macroéconomiques globalement sains. Les valorisations restent attrayantes, en particulier sur les marchés locaux, où les devises semblent sous-évaluées et où les écarts de rendement réels par rapport aux marchés développés restent significatifs. Le contexte général est favorable, avec des anticipations de dépréciation du dollar alimentées par des dépenses publiques soutenues et une politique monétaire accommodante, lesquelles soutiennent la demande des investisseurs pour les actifs des marchés émergents. Cela dit, nous pensons que les performances devraient rester différenciées, faisant des fondamentaux nationaux et des orientations politiques les principaux facteurs de la valeur relative.
Obligations d’entreprises
Analyse mensuelle
Le crédit Investment Grade s’est à nouveau révélé performant en octobre, favorisé par des fondamentaux solides, des bénéfices résilients, et une demande de portage soutenue. Toutefois, le sentiment du marché s'est fait plus prudent face à des actualités singulières et aux anticipations d'une augmentation de l'offre liée à l'IA et aux investissements aux États-Unis. Les spreads des obligations IG mondiales ont terminé en hausse de 2 pb, les titres américains ayant sous-performé (+4 pb à +78 pb) et les titres européens ayant surperformé (-2 pb à +77 pb)5. Aux États-Unis, les spreads des secteurs de la finance et de l’industrie ont connu un léger élargissement, tandis qu’en Europe, le secteur industriel – notamment l'automobile, l'hôtellerie et la distribution – a enregistré les plus fortes hausses ; les banques ont surperformé tandis que les compagnies d’assurance ont sous-performé. Les spreads des obligations subordonnées et hybrides se sont légèrement resserrés. Les résultats du T3 ont été globalement solides : les banques ont continué d'afficher des revenus solides et un contrôle rigoureux des coûts, avec une détérioration limitée du crédit, tandis que les entreprises non financières ont généralement dépassé les attentes revues à la baisse. L’activité de fusions-acquisitions est restée dynamique sous l’impulsion des États-Unis, avec des transactions importantes dans les services aux collectivités, les boissons et les banques, et une activité de télécommunications notable en Europe. Les facteurs techniques sont restés favorables en Europe, où 48 Mds € de nouvelles émissions ont été bien absorbés (648 Mds € depuis le début de l'année, +8 % en glissement annuel), tandis que l'offre abondante aux États-Unis (161 Mds $, un record pour un mois d'octobre ; 1 510 Mds $ depuis le début de l'année, +6 % en glissement annuel) a légèrement pesé sur les spreads, les flux entrants restant robustes6.
Les performances des obligations High Yield aux États-Unis et dans le monde ont ralenti en octobre dans un contexte de hausse de la volatilité. Les inquiétudes concernant la résilience des consommateurs à faibles revenus, le regain de tensions commerciales avec la Chine et les déclarations inattendues du président de la Fed, Jerome Powell, ont pesé sur le sentiment. Les émissions ont fortement diminué sur le marché primaire d’un mois sur l’autre, bien qu’elles se situent à des niveaux habituels pour la période, tandis que la demande des particuliers pour les crédits à effet de levier s'est affaiblie. La dispersion du marché s'est accrue parallèlement à une légère hausse du taux de défaut, reflétant une plus grande différenciation entre les émetteurs et les secteurs.
Les obligations convertibles mondiales ont à nouveau enregistré une solide performance en octobre, soutenues par des émissions importantes et un intérêt soutenu des investisseurs, et ce malgré une volatilité accrue due à la reprise des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine et au discours restrictif de la Fed. Les rendements ont de nouveau été stimulés par les thèmes de l’IA et de la technologie qui ont dominé ces derniers mois. La classe d’actifs a sous-performé les actions mondiales, mais a surperformé les obligations traditionnelles. L’activité est restée solide sur le marché primaire, avec 11,7 Mds $ émis en octobre, soit 2,5 fois le total mensuel habituel, portant l'offre cumulée depuis le début de l'année à 137,5 Mds $, ce qui place le marché sur la voie d'une année record en termes d'émissions7.
Perspectives
À l'approche de la fin de l'année, nous restons prudemment optimistes à l’égard des obligations Investment Grade ; nous anticipons une croissance modérée et un risque limité de dégradation ou de défaut. Les fondamentaux des entreprises sont solides, soutenus par des bilans prudents et un endettement maîtrisé, tandis que les données techniques restent favorables malgré un volume d'émissions et d'opérations de fusions-acquisitions élevé, notamment dans les secteurs des technologies et de l'intelligence artificielle aux États-Unis. Nous maintenons une position neutre en matière de duration et continuons à privilégier les stratégies misant sur une pentification de la courbe dans un contexte d'évolution de l'offre et de la demande. Si le portage reste le principal moteur de performance, le resserrement des spreads et la volatilité potentielle liée aux ajustements de la politique monétaire des banques centrales plaident en faveur de la sélectivité. Nous privilégions les émetteurs présentant des fondamentaux solides, une faible cyclicité et des flux de trésorerie résilients, en particulier dans les régions où les politiques restent accommodantes et les risques budgétaires maîtrisés.
Nous abordons le dernier trimestre avec des perspectives légèrement améliorées, mais toujours prudentes, sur les obligations High Yield. Bien que le pic de volatilité lié aux tensions commerciales semble révolu et que la croissance économique demeure soutenue, la faiblesse des données sur l'emploi et les signes de lassitude des consommateurs appellent à la prudence. L'IPC de septembre a réservé de mauvaises surprises et les bénéfices des entreprises ont généralement bien résisté, mais les valorisations restent tendues. Les spreads se situent environ 30 pb au-dessus de leurs plus bas niveaux depuis la crise financière mondiale, malgré un rendement global historiquement attractif. Nous anticipons une croissance plus lente mais positive et une inflation modérément persistante. Dans ce contexte, les fondamentaux du crédit restent solides, mais l’équilibre des risques souligne l'importance de la sélectivité, car une grande partie des bonnes nouvelles semblent déjà intégrées aux cours.
Nous restons optimistes quant aux fondamentaux des obligations convertibles à l'approche de la fin de l'année. Bien que l'incertitude commerciale et politique se soit quelque peu atténuée, des données économiques mitigées – notamment un ralentissement de la croissance de l'emploi et une hausse des prix à la consommation – laissent présager une croissance plus lente mais toujours positive, assortie de pressions inflationnistes persistantes. La classe d’actifs continue de présenter des caractéristiques asymétriques attrayantes, même si la hausse des deltas l’a rendue plus sensible aux actions à mesure que les marchés boursiers se renforçaient. Nous estimons que cela justifie une approche sélective, axée sur des structures équilibrées et convexes où les valorisations offrent encore des options favorables aux gestionnaires actifs.
Produits titrisés
Analyse mensuelle
Le crédit titrisé a enregistré de solides performances en octobre, avec un léger resserrement des spreads et une surperformance du secteur par rapport à la plupart des marchés obligataires, en particulier les obligations d'entreprises IG et HY. Les spreads des MBS d'agences se sont resserrés de 2 pb à +124 pb par rapport aux bons du Trésor, et l'indice des MBS d'agences américaines a enregistré une performance de 0,86 %, prolongeant ainsi une série de six mois de surperformance. Les positions en MBS de la Fed ont diminué de 16 Mds $ pour atteindre 2 060 Mds $, tandis que ceux des banques américaines ont légèrement augmenté pour atteindre 2 710 Mds $ et devraient continuer à progresser à mesure que les contraintes de capital s'atténuent.8 Les gestionnaires de fonds sont restés les principaux acheteurs, soutenus par des valorisations attractives. Les spreads des RMBS, ABS et CMBS hors agences se sont tous resserrés de 0 à 5 pb dans un contexte de fondamentaux stables et de performance de crédit gérable. Les RMBS ont bénéficié de la solidité des bilans des ménages, d'une forte valeur des capitaux propres immobiliers et d'un faible taux de défaut, malgré des volumes d'émission modérés. Dans la sphère des ABS, la hausse des défauts de paiement des consommateurs à faibles revenus reste contenue, tandis que la performance des CMBS a été mitigée ; les espaces de bureaux de classe B ont sous-performé, un résultat compensé par la vigueur des secteurs de la logistique, du logement collectif et de l’hôtellerie haut de gamme.
Les spreads titrisés européens sont restés largement inchangés et restent resserrés par rapport à ceux des actifs américains comparables, ce qui a entraîné une rotation progressive vers les opportunités américaines. Dans l’ensemble, le crédit titrisé a continué de bénéficier de fondamentaux solides, d’une performance résiliente des garanties et d’indicateurs techniques robustes, alors même que les niveaux d’émission d’ABS (40,4 Mds $), de CMBS (17,3 Mds $) et de RMBS (19,4 Mds $) sont restés globalement stables9.
Perspectives
Nous prévoyons un resserrement continu des spreads des MBS d'agences américaines, les valorisations relatives attractives attirant des flux de capitaux de la part des banques et des investisseurs axés sur la valeur. Bien qu’une partie de cet ajustement ait eu lieu en octobre, nous anticipons une compression supplémentaire des spreads à mesure que la Fed approche de la fin de son cycle de baisse des taux en 2026. Les spreads des titres de crédit titrisés au sens large devraient se maintenir proches de leurs niveaux actuels, la courbe des taux s'étant sensiblement aplatie depuis le début de l'année, limitant ainsi les possibilités de resserrement supplémentaire en l'absence d'une hausse plus marquée des MBS d'agences.
Nous prévoyons que les performances à court terme seront principalement stimulées par le portage, les rendements du secteur restant attractifs. Le niveau élevé des taux continue de peser sur le bilan des ménages, ce qui entraîne des tensions parmi les emprunteurs à faibles revenus dans le domaine des ABS liés à la consommation, tandis que l'immobilier commercial reste confronté à des coûts de financement élevés malgré un certain assouplissement. En revanche, le crédit hypothécaire résidentiel reste notre secteur privilégié, offrant des fondamentaux solides et des performances ajustées du risque favorables, en particulier dans les tranches à haut rendement. Dans l'ensemble, les valorisations des MBS d'agences restent attractives, tant par rapport aux obligations d'entreprises Investment Grade que par rapport aux moyennes historiques, ce qui étaye notre opinion positive sur le secteur.
Obligations municipales imposables
Analyse mensuelle
Les obligations municipales imposables ont progressé de 1,08 % en octobre, portant leur performance depuis le début de l'année à 7,58 %. Leur performance a été légèrement inférieure à celle des obligations municipales exonérées d'impôt (+1,24 %), mais elle est restée solide par rapport aux autres secteurs obligataires, surperformant ainsi les bons du Trésor (+0,80 %) et les obligations d'entreprises Investment Grade (+0,92 %). Les obligations municipales imposables à long terme (+1,40 %) ont surperformé les obligations à moyen terme (+0,62 %) dans un contexte de léger aplatissement de la courbe, les rendements des bons du Trésor à 5 et 30 ans ayant reculé respectivement de 3 et 6 pb. Les gains enregistrés en début de mois reflètent la faiblesse des données sur l'emploi, qui l'emporte sur les anticipations inflationnistes persistantes. L'indice Bloomberg Taxable Municipal a clôturé le mois avec un rendement de 4,78 %, soit environ 85 à 90 pb de plus que les bons du Trésor de même duration et 20 à 25 pb de plus que les obligations d'entreprises de même notation10. Les spreads se sont légèrement resserrés, les investisseurs continuant à privilégier les produits à spread de haute qualité, soulignant la forte valeur relative et la stabilité de la demande.
Perspectives
Malgré la deuxième baisse consécutive de 25 pb des taux directeurs de la Fed en octobre, la posture restrictive de son président, Jerome Powell, a tempéré l'optimisme du marché, laissant planer l'incertitude quant à une éventuelle décision en décembre. Face aux données limitées pendant la paralysie partielle de l’administration fédérale, les investisseurs se sont appuyés sur des indicateurs privés reflétant une situation mitigée sur le marché du travail et une inflation persistante. La reprise de la publication des données en novembre devrait clarifier la situation macroéconomique et aider à recalibrer les anticipations en matière de croissance et de politique monétaire.
Si l'évolution des anticipations de taux peut entraîner une volatilité à court terme, les rendements absolus élevés, l'offre limitée et la résilience des fondamentaux du crédit constituent un contexte favorable pour les obligations municipales imposables. Le secteur continue d’offrir des avantages significatifs en termes de rendement par rapport aux bons du Trésor et aux obligations d’entreprises, et la demande institutionnelle régulière devrait maintenir les valorisations bien ancrées à un niveau stable jusqu'à la fin de l'année.