Analyses
Qui dit correction en avril, dit rebond en mai ?
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Global Fixed Income Bulletin
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juin 17, 2025
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juin 17, 2025
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Qui dit correction en avril, dit rebond en mai ? |
Les actifs risqués ont poursuivi leur reprise tout au long du mois, stimulés par une désescalade de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine et par une volatilité globalement modérée durant la période.
Dans l’ensemble, les rendements des emprunts d’État des marchés développés ont augmenté au cours du mois, à la faveur d’un sentiment généralisé d’appétit pour le risque. Les rendements à 10 ans ont progressé de 24 points de base (pb) aux États-Unis, de 18 bp au Japon, de 21 pb au Royaume-Uni et de 6 pb en Allemagne. Les rendements souverains des marchés émergents ont affiché des performances mitigées. Des pays tels que la Hongrie, la Pologne, la Corée du Sud et la Chine ont vu leurs rendements augmenter, tandis que la Thaïlande, le Brésil, le Mexique et l’Afrique du Sud se sont inscrits en baisse, les rendements sud-africains enregistrant notamment une chute impressionnante de 44 pb. Le dollar américain s’est stabilisé en ne perdant que 0,1 % par rapport à un panier devises durant le mois.
Sur les segments obligataires, les spreads des titres Investment Grade (IG) américains se sont resserrés de 18 pb, contre 12 pb pour les titres IG européens. Les spreads High Yield américains se sont davantage contractés (69 pb) que leurs homologues européens (39 pb). Les spreads du crédit titrisé et des MBS d’agences se sont également resserrés courant mai.
Perspectives des marchés obligataires
La différence qu’un mois peut apporter En fin de mois, les spreads de crédit Investment Grade (IG) avaient entièrement effacé leur forte hausse ayant suivi le « Liberation Day », tandis que les spreads High Yield s’étaient resserrés de 50 pb par rapport au 2 avril, en écho au rebond de 4 % des marchés actions sur la même période. Les rendements ont légèrement augmenté pendant cette reprise des actifs risqués. Malgré l’incertitude persistante en matière de politique commerciale, l’économie a fait preuve de résilience, même si les premiers signes de tension commencent à apparaître. Bien que l’issue des droits de douane reste incertaine dans l’attente des décisions judiciaires et des négociations commerciales, les marchés se sont rassurés en évacuant les scénarios les plus pessimistes. Tous les regards sont désormais tournés vers la loi baptisée « One Big Beautiful Bill Act » (OBBBA) et ses conséquences sur la dette et les déficits. Le Congressional Budget Office (CBO) prévoit que l’OBBBA fera gonfler la dette publique de 3 000 milliards de dollars, soit 10 % du PIB, au cours de la prochaine décennie. L’impact devrait principalement être ressenti en début de période, portant le déficit à 7 % du PIB d’ici 2026. Parmi les pays du G7, seule la France affiche un déficit assez similaire. Alors que la Fed réduit la taille de son bilan, que de nombreux investisseurs étrangers préfèrent éviter le marché des bons du Trésor et que l’épargne des ménages est inférieure à 5 % de leurs revenus, une question se pose : comment ces déficits pourront-ils être financés sans entraîner une augmentation des rendements des bons du Trésor et sans peser sur les autres classes d’actifs ? L’abaissement de la notation de crédit des États-Unis par Moody’s le 16 mai, de Aaa à Aa1, reflète clairement ces inquiétudes.
L’évolution future de la croissance et de l’inflation reste incertaine. Le débat de longue date sur la capacité des baisses d’impôts à financer la croissance refait surface avec l’OBBBA. Si la productivité est notoirement difficile à prévoir, la croissance de la population active, conditionnée par les tendances démographiques, est plus prévisible et laisse entrevoir un ralentissement. Ces tendances suggèrent une trajectoire de croissance inférieure à la moyenne annuelle de 2,4 % enregistrée au cours de la dernière décennie. Le CBO prévoit une croissance annuelle de seulement 1,8 % au cours des dix prochaines années, tandis que le Bureau of Labor Statistics propose une estimation similaire de 1,9 %. Injecter des mesures de relance dans une économie déjà proche du plein emploi complique la tâche de la Fed, d’autant plus que la hausse de l’indice PCE sous-jacent reste supérieure de 0,5 % à l’objectif. La Fed maintient une position restrictive, comme en témoigne le taux des fonds fédéraux qui est supérieur de près de 200 pb à l’indice PCE sous-jacent. La courbe des taux reste inversée entre les bons du Trésor à 3 mois (T-bills) et à 7 ans (T-notes). Les anticipations du marché concernant le nombre de baisses de taux se sont modérées, passant de quatre à deux depuis le « Liberation Day », soit tout de même une de plus qu’au début de l'année. Ces perspectives peuvent sembler optimistes, à moins que l’inflation ne montre des signes plus clairs d’essoufflement, ce qui est peu probable à court terme, car les droits de douane font grimper les prix des marchandises.
Les perspectives de croissance à court terme sont assombries par l’incertitude politique. Les droits de douane restent la principale préoccupation, mais la forme finale de l’OBBBA et la politique d’immigration pèsent également lourdement sur le sentiment. Les attentes des consommateurs se sont fortement détériorées, l’enquête de l’université du Michigan oscillant près des niveaux les plus bas observés lors de la crise financière mondiale et du pic d’inflation de 2022. L’indice PMI des services de l’Institute for Supply Management (ISM) est passé sous la barre des 50, et le rebond hivernal de l’indice ISM manufacturier s’est estompé au printemps. L’emploi est resté stable, mais demeure la principale variable à surveiller. Si la croissance du PIB ralentit comme prévu de 1,5 % par rapport aux niveaux de 2023-2024, le chômage pourrait facilement atteindre ou dépasser les prévisions du consensus (4,4 %). La probabilité médiane d’une récession est passée à 40 %, contre 20 % en février. Dans l’ensemble, l’environnement économique reste stagflationniste, ce qui place la Fed dans une situation difficile et maintient les rendements dans une fourchette étroite jusqu’à ce que les données prennent une orientation claire.
En revanche, les perspectives monétaires et budgétaires de la zone euro semblent plus évidentes. La viabilité budgétaire est moins préoccupante, à l’exception notable de la France, et plusieurs États ont bénéficié d’une relèvement de leur notation de crédit. Les espoirs d’une relance budgétaire d’ampleur en Allemagne se sont tempérés, car nous pensons que les dépenses liées aux investissements prendront du temps à se concrétiser, leur impact économique n’étant attendu que fin 2026. L’inflation, y compris dans les services, est en baisse et les marchés anticipent désormais une inflation inférieure à l’objectif de la BCE dans les années à venir. Les droits de douane devraient freiner à la fois la croissance et l’inflation dans la zone euro, ce qui permettra aux marchés d’intégrer plus facilement de nouvelles mesures d’assouplissement de la part de la BCE. En conséquence, les Bunds à 10 ans ont surperformé les bons du Trésor américain à 10 ans de 20 pb en mai.1 Cependant, la BCE ayant déjà réduit ses taux en juin et la croissance se maintenant mieux que prévu, de nouvelles baisses pourraient être limitées, à moins qu'un choc négatif ne se produise.
Les rendements des emprunts d’État japonais (JGB) ont poursuivi leur correction en mai ; le Japon se rapproche en effet d’un accord commercial avec les États-Unis, ce qui a réduit les risques de baisse. La Banque du Japon a surpris les marchés en adoptant une posture accommodante, alors même que l’inflation continue de dépasser les attentes, renforçant ainsi les arguments en faveur d’une normalisation de la politique monétaire. Les JGB à long terme ont subi une pression importante à la suite des faibles résultats des adjudications. Bien que les rendements aient atteint des niveaux auparavant considérés comme attractifs pour les investisseurs institutionnels nationaux, la demande de cette catégorie a été notablement absente, ce qui soulève des questions quant au soutien futur de la partie longue de la courbe.
Les marchés des devises ont une fois de plus été dominés par le dollar américain. Celui-ci s’est initialement redressé dans le sillage du rebond des actifs risqués et à l’apaisement des craintes liées aux droits de douane. Mais cette performance s’est estompée en fin de mois lorsque les inquiétudes concernant la viabilité budgétaire des États-Unis occupant le devant de la scène. Le déficit commercial américain, le déficit budgétaire et la valorisation du dollar, déjà élevée selon les critères conventionnels, sont étroitement liés. Une évolution brutale de l’un de ces paramètres pourrait déclencher des ajustements désordonnés chez les autres. Jusqu’à présent, peu d’éléments indiquent que les investisseurs étrangers réduisent leur exposition aux actifs américains. Mais si les investisseurs étrangers étaient moins enclins à financer le déficit commercial américain, cela pourrait avoir de graves répercussions sur le dollar et l’économie en général.
Taux et devises des marchés développés
Analyse mensuelle
Après un mois d’avril volatil, les actifs risqués ont fortement rebondi en mai, grâce notamment à une importante désescalade des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine. Les deux pays ont convenu d’une réduction de 115 points des droits de douane bilatéraux pendant 90 jours et ont exprimé leur volonté commune d’éviter un découplage économique, un résultat qui a dépassé les attentes. Les données économiques ont montré que les préoccupations commerciales n’avaient qu’un impact immédiat limité, même si la constitution de stocks par les consommateurs américains avant l’entrée en vigueur des droits de douane a pu temporairement stimuler la demande. Le marché du travail américain est resté bien orienté, comme en témoignent des chiffres de l’emploi supérieurs aux attentes, tandis que l’inflation est restée modérée. Les taux d’intérêt mondiaux ont augmenté dans un contexte de regain d'appétit pour le risque, et les bons du Trésor US ont sous-performé tandis que les Bunds allemands ont surperformé. Les évolutions en matière de politique budgétaire ont également attiré l’attention, en particulier l’adoption par la Chambre des représentants du « One Big Beautiful Bill Act » de Donald Trump, qui prolonge les réductions d'impôts de 2017 et attend désormais l’approbation du Sénat.
En Europe, le sentiment s’est légèrement amélioré, même si les données sur l’inflation ont justifié de nouvelles baisses des taux de la part de la BCE. La confiance dans le secteur manufacturier s’est améliorée, tandis que celui des services a enregistré une contraction inattendue. Les pressions désinflationnistes ont persisté. Au milieu du mois, Donald Trump a menacé d’imposer des droits de douane de 50 % sur les importations européennes, mais la mise en œuvre a été reportée à juillet grâce à des avancées diplomatiques. La courbe des emprunts d’État japonais s’est pentifiée en raison de la faiblesse de la demande pour les titres à long terme.
Sur les marchés des devises, le dollar américain s’est stabilisé après sa forte correction d’avril, tandis que les devises à haut rendement ont rebondi dans un contexte de volatilité moindre. La livre sterling et la couronne norvégienne ont été les plus performantes parmi les pays du G10, et l’indice du dollar calculé par Bloomberg a terminé le mois de mai en baisse de 0,6 %, malgré une brève hausse de 1,3 %.2
Perspectives
Nous maintenons une surpondération de la duration sur les obligations des marchés développés (MD), reflétant notre opinion selon laquelle les risques commerciaux, malgré le récent recul des droits de douane américains, restent élevés et pourraient peser sur les résultats économiques à court terme. Nous maintenons des positions en vue d’une pentification de la courbe des bons du Trésor américain et des Bunds allemands, car nous considérons les obligations à court terme comme attractives dans un scénario où les banques centrales réagissent à la hausse des risques de baisse par des baisses de taux plus agressives. À l’inverse, les obligations à plus long terme pourraient sous-performer si les primes de terme augmentent du fait des inquiétudes croissantes quant à la viabilité budgétaire.
Nous privilégions la duration aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Nouvelle-Zélande par rapport à l’Australie et au Japon. Au Japon, nous maintenons également des positions longues sur les points morts d’inflation. Sur le marché des changes, nous avons opté pour une exposition courte au dollar américain face à un panier diversifié de devises, incluant des devises émergentes qui, selon nous, pourraient bénéficier d'une hausse des ratios de couverture sur les actifs en USD, des conversions des exportateurs et d’un environnement macroéconomique plus favorable aux économies émergentes.
Taux et devises des marchés émergents
Analyse mensuelle
La dette des marchés émergents (EMD) a enregistré des performances positives en mai, dans un contexte de renforcement généralisé des devises émergentes et de dépréciation continue du dollar. Les spreads de crédit se sont resserrés aussi bien sur le segment des emprunts d’État que des obligations d’entreprises, reflétant une baisse de la volatilité des marchés suite à l’annonce des droits de douane du 2 avril. Malgré la hausse des rendements des bons du Trésor US, les obligations émergentes libellées en devises fortes ont signé des performances positives, soulignant la résilience des investisseurs. L’avancée des négociations commerciales mondiales a également contribué à l’optimisme des marchés, les États-Unis et la Chine ayant conclu un accord préliminaire visant à réduire significativement les droits de douane, qui a effectivement suspendu provisoirement la guerre commerciale. Cependant, en fin de mois, les tensions ont refait surface, les deux parties s’accusant mutuellement de violation de la trêve. L’actualité politique s’est avérée significative durant le mois, puisque des élections cruciales se sont tenues au Suriname et en Pologne, et se sont soldées par une victoire de l’opposition. Au Suriname, le gouvernement sortant avait mis en œuvre des réformes budgétaires et supervisé la restructuration de la dette de 2023, mais un gouvernement de coalition sera désormais nécessaire pour obtenir la majorité. En Pologne, l’arrivée au pouvoir d’un parti conservateur, moins proche de l’UE, pourrait signaler un changement d’orientation politique du pays. Le sentiment des investisseurs à l’égard de la dette émergente s’est amélioré, comme en témoignent les flux de capitaux positifs vers les fonds libellés en devises fortes et en monnaie locale. Ce regain d’intérêt pourrait signaler un regain d’appétit pour le risque à l’échelle mondiale, potentiellement bénéfique pour la classe d’actifs à l’avenir.
Perspectives
La dette émergente continue d’offrir des opportunités intéressantes à l’échelle des pays, tandis que les conditions macroéconomiques globales sont également de plus en plus favorables. Les anticipations de dépréciation du dollar devraient soutenir les devises émergentes, et les écarts de rendement réel entre les marchés émergents et développés restent attractifs. Plusieurs banques centrales des marchés développés ont déjà commencé à assouplir leur politique monétaire au premier semestre.3 Cependant, le calendrier et les facteurs déclencheurs d’une potentielle baisse des taux par la Réserve fédérale américaine restent incertains. Parallèlement, les marchés mondiaux continuent d’afficher une volatilité alimentée par l’évolution des politiques commerciales. Malgré ce contexte, nous restons concentrés sur les fondamentaux et les réponses politiques spécifiques à chaque pays qui, selon nous, constitueront des facteurs de différenciation essentiels à l’avenir. La hausse des taux d’intérêt américains pourrait signaler une évolution du comportement des investisseurs, en quête d’opportunités alternatives. Dans ce contexte, la dette émergente devrait bénéficier d’une potentielle réallocation des capitaux, notamment à mesure que les investisseurs réévaluent la dynamique risque-rendement sur les marchés obligataires mondiaux.
Obligations d’entreprises
Analyse mensuelle
Les titres de crédit Investment Grade ont enregistré de solides performances en mai, soutenus par l’apaisement des tensions commerciales, une volatilité modérée et des fondamentaux techniques solides. Les titres IG américains ont légèrement surperformé leurs équivalents européens, grâce à une dynamique de marché favorable et à une activité d’émission soutenue, en particulier de la part des entreprises américaines qui ont profité de financements en euros à moindre coût. Le sentiment a été stimulé par l’accord commercial conclu entre les États-Unis et le Royaume-Uni suite au « Liberation Day » et par l’accord de réduction temporaire des droits de douane avec la Chine, même si les incertitudes juridiques liées aux droits de douane de Donald Trump persistent. Les banques centrales sont restées prudentes : la Fed a fait preuve de patience, la Banque d’Angleterre a baissé ses taux mais a conservé une posture agressive, et la BCE est restée en retrait. Les données économiques ont été mitigées, avec une amélioration des indicateurs américains contrastant avec l’affaiblissement des indices PMI de la zone euro. Étonnamment, l’inflation s’est inscrite en hausse au Royaume-Uni et en Europe, tandis qu’elle est restée conforme aux attentes aux États-Unis. Malgré des afflux de capitaux et des émissions records, les performances du marché secondaire ont été plus modérées, reflétant un suivi limité de la part des investisseurs.
Les marchés High Yield américains et mondiaux ont enregistré de solides performances en mai, malgré la hausse des rendements des bons du Trésor et le regain d’inquiétudes au plan budgétaire. Le rendement des bons du Trésor à 5 ans a augmenté d’environ 25 pb au cours du mois, sous l’effet des inquiétudes concernant la viabilité budgétaire des États-Unis, d’une dégradation largement anticipée de la note de crédit et des tensions commerciales persistantes, en particulier avec la Chine. La forte demande de crédit à effet de levier et le volume important de nouvelles émissions ont contribué à absorber le volume net des nouvelles émissions, ce qui a entraîné un resserrement significatif des spreads qui a plus que compensé la hausse des rendements des bons du Trésor. Les opérations d’échange d’émetteurs en difficulté et de gestion du passif (LME) ont diminué, mais les défauts de paiement de coupons ont augmenté. Dans l’ensemble, l’environnement est resté favorable, ce qui s’est traduit par la meilleure performance mensuelle des titres High Yield américains depuis près d’un an.4
Les obligations convertibles mondiales ont également enregistré de bons résultats, bénéficiant de la reprise générale des actifs risqués. Cette classe d’actifs a été stimulée par les émetteurs à beta et delta élevés, les actions mondiales ayant rebondi après la volatilité du mois d’avril. Si les obligations convertibles ont sous-performé les actions mondiales, elles ont toutefois surperformé les obligations mondiales au cours du mois. Le marché primaire a fortement rebondi, affichant 18,7 milliards de dollars de nouvelles émissions, soit le total mensuel le plus élevé depuis mars 2021, lors de la vague d’émissions provoquée par la pandémie. Toutes les régions ont contribué pour plus d’un milliard de dollars aux nouvelles émissions, les États-Unis arrivant en tête avec 13,5 milliards de dollars. Depuis le début de l’année, le volume total de nouvelles émissions a atteint 44,3 milliards de dollars, soit un peu moins qu’à la même période en 2024.5
Perspectives
Nous restons prudemment optimistes à l’égard du crédit, anticipant un environnement de faible croissance sans augmentation significative du risque de dégradation ou de défaut. La politique européenne reste globalement favorable, tandis que les perspectives budgétaires américaines sont plus mitigées. Les fondamentaux des entreprises sont solides, celles-ci continuant à privilégier des stratégies financières prudentes. Les conditions techniques sont favorables également, soutenues par un volume gérable de nouvelles émissions et une demande soutenue pour les titres Investment Grade. À l’avenir, nous pensons que les spreads de crédit seront quelque peu sensibles à l’actualité macroéconomique et géopolitique, mais nous ne prévoyons pas d’écart significatif par rapport à notre scénario de base. Aux niveaux actuels, les spreads semblent proches de leur juste valeur, et le portage devrait donc être le principal moteur de la performance. Cependant, nous entrevoyons également des opportunités de gains supplémentaires grâce à la sélection des secteurs et des titres. Compte tenu du contexte incertain à moyen terme, notamment l’ambiguïté de la politique américaine, les tensions politiques et les perspectives inégales en matière de croissance et d’inflation, nous ne prévoyons pas de resserrement significatif des spreads.
En ce début du mois de juin, nous restons prudents à l’égard du marché High Yield. Nos perspectives reflètent un paysage politique complexe et en constante évolution, notamment en matière d’échanges commerciaux, d’immigration et de fiscalité. Nous prévoyons également une inflation persistante, un ralentissement de la croissance et un risque élevé de récession. La volatilité reste élevée sur les marchés. Si les rendements sont historiquement attractifs, le spread moyen des titres High Yield a terminé le mois de mai à près de 75 pb au-dessus de son plus bas niveau de janvier, et nous estimons que les valorisations restent vulnérables à un élargissement. Cette opinion s’appuie sur une analyse complète des principaux facteurs : politique commerciale et monétaire, tendances économiques mondiales, santé des consommateurs, fondamentaux des émetteurs, conditions techniques et valorisations relatives. Selon nous, une plus grande différenciation des prix est probable, en particulier sur les segments les moins bien notés et les plus en difficulté de l’univers des crédits à effet de levier.
Nous restons optimistes à l’égard du marché mondial des obligations convertibles à l’approche du troisième trimestre. Après un fort rebond en mai, nous pensons que les obligations convertibles restent bien positionnées en raison de leur profil de performance asymétrique, soutenu par le principe du « plancher obligataire ». Nous pensons que cette dynamique devrait perdurer, en particulier dans un marché caractérisé par l’incertitude et la volatilité. Les émissions primaires ont également montré des signes de reprise en mai, et nous prévoyons que cette tendance se poursuivra. Les entreprises devraient rester actives dans le domaine des obligations convertibles, alors qu’elles font face à des taux d’intérêt élevés et s’adaptent à l’évolution de la politique monétaire mondiale.
Titrisation
Analyse mensuelle
Les marchés des crédits titrisés ont connu un léger resserrement en mai, même s’ils ont globalement sous-performé les autres secteurs obligataires. La courbe des bons du Trésor américain s’est aplatie à mesure que les anticipations de baisse des taux s’estompaient, les marchés ne tablant désormais plus que sur deux baisses en 2025, contre quatre auparavant. Cela a entraîné une hausse des rendements : ceux des bons du Trésor US à 2 et 10 ans se sont inscrits en hausse de 30 et 24 pb, respectivement. Les spreads des titres adossés à des créances hypothécaires (MBS) se sont légèrement resserrés (de 4 pb à +155 pb) par rapport aux bons du Trésor, e qui reste élevé par rapport aux normes historiques. La Fed a continué de réduire ses positions sur les MBS, tandis que les banques sont restées stables et que les gérants sont restés des acheteurs actifs.
Les émissions ont fortement rebondi dans tous les secteurs titrisés après un mois d’avril morose. Les émissions d’ABS ont plus que doublé pour atteindre 34,3 milliards de dollars, celles de CMBS ont atteint 17,8 milliards de dollars et celles de RMBS ont augmenté de 15 % pour atteindre 12,7 milliards de dollars.6 Malgré la hausse des taux, les fondamentaux du crédit hypothécaire sont restés solides, soutenus par la forte valeur du patrimoine immobilier des propriétaires, le faible taux de chômage et l’activité de refinancement limitée. Les spreads des RMBS et des ABS non garantis par des agences se sont resserrés, entre 15 et 25 pb pour les premiers et entre 20 et 30 pb pour les seconds. De leur côté, les spreads des CMBS se sont resserrés entre 20 et 40 pb, la vigueur des segments des appartements haut de gamme, de la logistique et des hôtels de luxe ayant compensé la faiblesse des bureaux de classe B.
Perspectives
Nous prévoyons un resserrement des spreads des MBS américains d’agences au second semestre, sous l’effet d’une reprise de la demande des investisseurs en valeur relative et des banques, attirés par le profil de rendement attractif du secteur par rapport à d’autres secteurs obligataires traditionnels et aux alternatives du marché monétaire. Toutefois, nous pensons qu’une compression significative des spreads est peu probable tant que la Réserve fédérale n’aura pas commencé à réduire ses taux d’intérêt, ce qui devrait intervenir d’ici la fin de l’année. Les spreads de crédit titrisés devraient rester stables à court terme, dans un contexte où les marchés attendant d’y voir plus clair sur les implications économiques de l’évolution des politiques de droits de douane et d’un éventuel resserrement des spreads des MBS d’agences. Depuis le début de l’année, les MBS d’agences ont été l’un des secteurs les plus performants, le crédit titrisé ayant également généré de solides performances.7 À l’avenir, les performances seront, selon nous, principalement conditionnées par le portage, soutenu par des niveaux de rendement attractifs en ce début de mois de juin. Néanmoins, les niveaux actuels des taux restent problématiques pour de nombreux emprunteurs. Nous prévoyons une pression continue sur les bilans des ménages, en particulier parmi les consommateurs à faibles revenus, ce qui pourrait entraîner des tensions supplémentaires dans certains segments des ABS liés à la consommation. L’immobilier commercial reste également sous pression en raison des coûts de financement élevés. En revanche, nous restons optimistes à l’égard du crédit hypothécaire résidentiel, qui reste le secteur que nous privilégions. C’est le seul domaine dans lequel nous sommes à l’aise pour étendre le spectre de crédit, tandis que nous restons plus prudents sur les ABS et les CMBS moins bien notés. Dans l’ensemble, les MBS d’agences continuent d’afficher, selon nous, une forte valeur relative, en particulier par rapport aux spreads de crédit Investment Grade et aux niveaux historiques des MBS d'agences.