Analyses
À la recherche de la résilience
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Global Equity Observer
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mars 31, 2020
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À la recherche de la résilience |
Nous vivons une période inédite. Les gouvernements ont délibérément, et de manière très compréhensible, fait basculer les économies dans une grave récession, ou comme l’a dit le Premier ministre australien, dans un état d’« hibernation économique », avec un mélange de distanciation sociale et de confinement. L’impact sur le PIB est difficile à quantifier mais sera extrêmement important, même par rapport à la crise financière de 2008.
On a parlé de chutes à deux chiffres du PIB au deuxième trimestre et de hausses record du chômage. Heureusement, de nombreux gouvernements ont déjà annoncé des mesures extrêmement importantes, tant pour protéger les entreprises que pour mettre de l’argent à disposition des personnes qui en auront le plus besoin. Le gouvernement britannique paiera 80 % des salaires de ceux qui ne sont pas en mesure de travailler, et les États-Unis ont adopté un train de mesures de 2000 milliards de dollars. Malheureusement, alors que certains pays européens prennent des mesures, notamment l’Allemagne, coordonner une réaction vigoureuse de la part de l’Union européenne prend un peu plus de temps.
Les réponses apportées par les gouvernements et les banques centrales semblent avoir calmé la panique financière et devraient permettre d’éviter une crise financière. Les marchés y ont en effet favorablement réagi depuis leur plus bas atteint le 23 mars dernier. Cependant, même avec les mesures gouvernementales les plus extrêmes, les bénéfices des entreprises seront gravement touchés cette année, et les particuliers, les entreprises et les gouvernements vont faire face à une hausse importante de leur dette. Cette dette devra être remboursée, annulée ou érodée par l’inflation - sans qu’aucune de ces options ne soit particulièrement favorable au marché actions. Si l’on se penche sur la situation des entreprises, beaucoup d’entre elles avaient déjà un endettement important au début de la crise, après s’être gavées d’argent bon marché pendant une décennie. Elles pourraient bien être confrontées à un double coup dur sur leurs ratios dette nette/EBITDA, avec un numérateur en hausse et un dénominateur en baisse. Malgré tous les efforts des gouvernements, nous allons au-devant de nombreux défauts de paiements.
Pour le marché, les difficultés ne sont sans doute pas terminées
La correction de 35 % du MSCI World entre le pic du 19 février et le creux du 23 mars a été très brutale, néanmoins si l’on considère le premier trimestre dans son ensemble, le marché n’a baissé « que » de 21 %. En tablant sur des bénéfices du marché en 2021 identiques à ceux de 2019, c’est-à-dire avec deux années de croissance perdues à jamais, cela suffirait à expliquer une baisse d’environ 20 % depuis le début de l’année, même sans se soucier des effets à long terme de la crise et du réveil douloureux causé par un endettement excessif. Nous ne sommes pas des stratèges « top-down », mais supposer un niveau de bénéfices en 2021 au même niveau que 2019 ne semble pas être un résultat particulièrement pessimiste. Le marché semble avoir changé d’avis, passant d’une correction rapide en forme de V à quelque chose de plus prolongé, mais il n’est pas certain qu’il ait pris en compte tous les dommages potentiels de la crise. Il faut également garder à l’esprit que le marché était cher au début de l’année, avec le MSCI World sur des multiples de 17x ce qui était alors les prévisions de bénéfices pour les douze mois à venir. Au début de l’année, nous avions des doutes sur le fait que ces bénéfices soient effectivement générés - maintenant, il est très clair qu’ils ne le seront pas.
La crise pourrait donner un nouvel élan à l’ESG
Certains ont fait remarquer que l’ESG était une mode liée aux marchés haussiers, un aspect « pratique mais non essentiel » qui disparaîtra lorsque les investisseurs auront d’autres priorités à traiter. Nous ne pensons pas que cela soit le cas. Il existe déjà des preuves que les fonds ESG ont continué à enregistrer des souscriptions alors même que les gens retiraient leur argent des actions en général. Et les fonds ESG ont, dans l'ensemble, obtenu de meilleurs résultats récemment. Nous pensons que l’ESG est là pour durer, parce que nous pensons que cela compte. En fait, nous pensons que le plus probable est que la crise actuelle relève l’importance des facteurs sociaux (par exemple, la manière dont les entreprises traitent leurs employés, la santé et la sécurité, les salaires et la sécurité de l’emploi) et commence à définir les grandes lignes pour des entreprises et une société plus durables. Après tout, les gouvernements font de très gros chèques pour maintenir les entreprises à flot… et il est légitime qu’ils demandent des comptes aux entreprises dans les années à venir, notamment en raison de leur tout nouveau goût pour l’interventionnisme.
Les atouts de la qualité
Heureusement, nos portefeuilles mondiaux sont, selon nous, de bien meilleure qualité que le marché, comme le montre la baisse modérée qu’ils ont encore affichée ce trimestre, tout comme en 2008, 2011, 2015 et 2018. Pour le premier trimestre, la baisse des portefeuilles se situe dans une fourchette comprise entre 12,9 % et 14,1 % en dollars, contre 21 % pour l’indice MSCI World. Cette surperformance est le résultat d’une surperformance appréciable réalisée au cours des dernières années. Même après la chute enregistrée ce trimestre, notre stratégie mondiale phare affiche une progression d’environ 8 % par an en dollars sur ces trois dernières années et de 9 % sur cinq ans, au 31 mars 2020. En revanche, l’indice n’a pu faire mieux que 2 ou 3 % pour ces deux périodes. Compte tenu de la force du dollar, les performances absolues ont été meilleures dans d’autres devises.
Les conséquences sur le portefeuille
L’attention que nous portons sans relâche aux entreprises disposant d’actifs immatériels puissants, notamment les marques et les réseaux, signifie qu’elles ont un pouvoir de fixation des prix et, lorsqu’il est combiné à des revenus récurrents, cela permet d’obtenir des bénéfices résilients en période difficile. Toutefois, cela ne signifie malheureusement pas que les entreprises en portefeuille soient à l’abri de ce qui se passe. En conséquence, nous procédons à une analyse d’impact de la crise sur les secteurs et les entreprises individuelles en trois volets.
Historiquement, nous nous sommes concentrés sur le deuxième volet, en veillant à ce que nos participations soient relativement plus résistantes que la moyenne dans les moments difficiles. Par conséquent, une grande partie des nouvelles missions de l’équipe s’est focalisée sur les effets directs spécifiques au COVID-19, le premier volet. Pour ce faire, nous sommes partis de l’hypothèse que le confinement durerait environ trois mois avec une période de distanciation sociale plus longue, puis nous avons associé ces effets à ceux d’un fort ralentissement économique jusqu’en 2021. Nous estimons qu’il s’agit là d’un scénario plutôt conservateur.
Nous avons également testé la résilience de certaines entreprises avec des stress tests beaucoup plus sévères, si le confinement devait durer plus longtemps. Il est important de noter que les bilans semblent résistants même dans les scénarios les plus difficiles, ce qui n’est pas le cas, selon nous, pour le marché dans son ensemble.
Un autre point qui mérite d’être souligné est que le dollar américain s’est renforcé par rapport à toutes les autres devises, en particulier celles des marchés émergents. Il s’agira clairement d’un important facteur négatif pour les entreprises dont les revenus sont exposés aux zones dont la devise s’est dépréciée, mais cela pourrait également être une opportunité lorsque les cours des actions des entreprises sont libellés dans des devises en baisse.
Si l’on conjugue les effets du COVID-19 et de la récession dans notre scénario conservateur, et si l’on évalue les devises à leur valeur de marché, la valeur intrinsèque de la plupart de nos participations devrait diminuer de 0 à 15 % en dollars. C’est moins que la chute de leurs cours, ce qui signifie que nos portefeuilles mondiaux sont légèrement plus orientés à la hausse qu’au début de l’année, même en cas de récession mondiale grave.
Analyse des principaux secteurs
80 à 85 % de nos portefeuilles mondiaux se trouvent dans les secteurs de la consommation non cyclique, de l’informatique ou de la santé. Ces trois secteurs sont abordés plus en détail ci-dessous.
Consommation non cyclique
Le secteur de la consommation non cyclique a une fois de plus fait ses preuves dans un contexte de ralentissement économique. La nature défensive du secteur n’est pas vraiment remise en question, et l’évolution de la performance du secteur de la consommation a été déterminée par les circonstances particulières et les effets directs de l’épidémie de COVID, le premier volet évoqué ci-dessus. La distribution alimentaire, un secteur que nous évitons étant donné les faibles marges et le manque de rendement du capital, a bénéficié des achats frénétiques liés à la panique. Ce phénomène a également profité aux fabricants de produits alimentaires, auxquels nous ne sommes pas exposés, ainsi qu’aux entreprises de produits ménagers et d’hygiène personnelle, auxquelles nous sommes exposés.
À l’autre extrémité du spectre de la consommation, le secteur des boissons est naturellement sous pression étant donné la fermeture des bars et des restaurants dans de nombreux pays. La consommation sur site représente 40 % des ventes des sociétés spécialisées dans les spiritueux et les boissons non alcoolisées que nous possédons. Le secteur de la beauté est quant à lui relativement discrétionnaire, et les produits de beauté de luxe, qui sont en partie liés aux voyages, ont souffert, mais la présence d’une plateforme de commerce en ligne bien établie, à l’instar de celle d’une société française de soins personnels que nous possédons, constitue une compensation appréciable. Bizarrement, le marché a jusqu’à présent traité le tabac de la même manière que les boissons, alors que nous considérons qu’il est beaucoup moins exposé aux mesures de distanciation sociale compte tenu des modes de consommation différents.
Informatique
Dans le secteur de l’informatique, les lignes du portefeuille sont principalement composées d’entreprises de logiciels et de services informatiques. Notre idée est que l’économie du logiciel en particulier devrait être relativement défensive en cas de récession. Lors de la crise financière mondiale, les bénéfices du secteur ont tenu le coup, tout comme les biens de consommation non cyclique et les soins de santé.
Il y a des raisons de penser que les sociétés de logiciels devraient être encore plus solides maintenant, étant donné l’augmentation des revenus récurrents grâce aux abonnements SaaS (Software as a Service) utilisant le cloud, qui sont beaucoup plus résilients que les simples ventes de logiciels. À titre d’exemple, la multinationale européenne de logiciels que nous détenons a abordé la crise financière mondiale avec seulement 50 % de ses bénéfices bruts provenant d’activités récurrentes, et la majeure partie restante provenait des licences de logiciels, qui ont chuté d’un quart. Ce chiffre atteint à présent 80 %. Le secteur des logiciels s’est en effet bien comporté au premier trimestre, en baisse de 5 % seulement, grâce à un bon début d’année avant la crise. La multinationale technologique américaine que nous détenons en portefeuille est en fait restée stable depuis le début de l’année, soutenue par la demande supplémentaire pour ses offres de services dans le cloud.
Le secteur des services informatiques (en baisse de 17 % au premier trimestre) est un peu plus cyclique que celui des logiciels, même si l’on peut dire qu’il l’est moins que le reste de l’informatique. Pour dire les choses simplement, les missions de conseil de la multinationale de services professionnels irlandaise que nous détenons en portefeuille sont plus discrétionnaires et de plus courte durée que les revenus de l’entreprise technologique américaine citée plus haut. Cela dit, cette société de services professionnels a émis un communiqué rassurant annonçant que ses revenus devraient rester à peu près inchangés sur un an glissant au cours des deux prochains trimestres et que les marges ne seraient pas affectées par la crise. Nous verrons si cette estimation s’avérera trop optimiste ou pas, compte tenu du confinement récent de l’Inde où se trouve un tiers du personnel, mais au moins la société bénéficiera des efforts des entreprises pour numériser et construire des outils de télétravail et de collaboration tant pour les employés que pour les clients.
Ailleurs dans les services informatiques, les activités principales des deux sociétés de services financiers que nous possédons semblent parfaitement solides, mais les deux sociétés sont confrontées à des problèmes spécifiques liés au COVID-19. L’effondrement des voyages internationaux frappe les activités transfrontalières très rentables de la société de paiement, qui représentent environ 30 % de ses revenus, même si le basculement vers des transactions en ligne va aider, tandis que l’activité d’acheteur de la société de services financiers que nous possédons risque d’être perturbée à court terme par les difficultés du commerce de détail non alimentaire. Un fournisseur de services de paie détenu en portefeuille est plus exposé au risque cyclique du volet 2, car il a été touché par les craintes d’une forte baisse de l’emploi aux États-Unis, étant donné que ses revenus sont déterminés par le nombre de personnes travaillant dans les petites et moyennes entreprises. La nature et l’efficacité du plan de sauvetage économique américain feront donc toute la différence.
Santé
Concernant le secteur de la santé, nos portefeuilles mondiaux sont concentrés dans les segments des équipements de soins et des sciences de la vie, qui sont moins exposés aux risques politiques et à l’expiration des brevets. Comme dans le cas des biens de consommation non cyclique, le secteur est incontestablement assez défensif, et il l’a montré pendant la crise, avec une baisse de seulement 11 % contre 21 % pour le MSCI World.
Cela se complique avec l’impact direct du COVID sur le secteur hospitalier. Les opérations non urgentes sont annulées ou retardées dans de nombreux pays, pour pouvoir faire face à la vague de patients infectés. Cela nuit aux fournisseurs de dispositifs médicaux, car on opère beaucoup moins de genoux ou d’autres parties du corps. Heureusement, nos positions sont plus orientées vers les produits consommables, par exemple les aiguilles ou les sacs stériles. Une société américaine de dispositifs médicaux et de soins de santé que nous détenons en portefeuille semble un peu plus vulnérable, avec 40 % de ses revenus provenant des biens d’équipement ou d’autres domaines susceptibles d’être reportés. Ceci étant dit, au moins 20 % de ses revenus proviennent des diagnostics, qui pourraient connaître un essor, et elle devrait réaliser de nombreuses ventes grâce à son test du COVID-19 qui ne nécessite que 5 minutes.
En conclusion
Nos portefeuilles mondiaux reposent sur la résilience. Nous avons une équipe résiliente, qui travaille très efficacement depuis chez elle, un processus d’investissement résilient, qui vérifie que les entreprises en portefeuille pourront continuer à se développer et évitent toute destruction permanente de capital, et enfin, et c’est peut-être le plus important, des portefeuilles résilients, qui ont une fois de plus permis de limiter la baisse en ces temps difficiles.
INFORMATIONS SUR LES RISQUES
Il ne peut être garanti qu’un portefeuille atteindra son objectif d’investissement. Les portefeuilles sont sujets au risque de marché, c’est-à-dire à la possibilité que la valeur de marché des titres en portefeuille baisse. En conséquence, cette stratégie expose l’investisseur à des pertes potentielles. Nous attirons votre attention sur le fait que cette stratégie peut comporter d’autres types de risques. L’évolution de l’économie mondiale, des dépenses et des préférences de consommation, de la concurrence, de la démographie, des réglementations publiques et des conditions économiques peut pénaliser les sociétés internationales et peut avoir un impact négatif plus prononcé sur la stratégie que si les actifs de la stratégie étaient investis dans un éventail plus large de sociétés. En général, la valeur des actions varie également en fonction des activités spécifiques à une entreprise. Les investissements sur les marchés étrangers s’accompagnent de risques particuliers, notamment les risques de change, politiques, économiques et de marché. Les actions de sociétés à petites capitalisations présentent des risques spécifiques, tels que des gammes de produits, des marchés et des ressources financières limitées, et une volatilité supérieure à celles des entreprises de grandes capitalisations plus solidement établies. Les risques associés aux investissements dans les pays émergents sont plus élevés que sur les marchés développés étrangers. Les portefeuilles peu diversifiés investissent dans un nombre plus restreint d’émetteurs. De ce fait, toute évolution de la situation financière ou de la valeur de marché d’un émetteur donné est susceptible d’entraîner une volatilité accrue. Stratégie de vente d’options. La vente d’options d’achat implique le risque que le Portefeuille soit obligé de vendre le titre ou l’instrument sous-jacent (ou de régler en espèces un montant d’une valeur égale) à un prix défavorable ou inférieur au cours du marché de ce titre ou instrument sous-jacent, au moment où l’option est exercée. En tant que vendeur d'une option d'achat, le Portefeuille renonce, pendant la durée de vie de l'option, à profiter des augmentations de la valeur marchande du titre ou de l'instrument sous-jacent couvrant l'option au-delà de la somme de la prime et du prix d'exercice, mais conserve le risque de perte correspondant à la baisse du cours du titre ou de l'instrument sous-jacent. De plus, la stratégie de vente d'options d'achat pourrait ne pas protéger le portefeuille entièrement contre les baisses de la valeur du marché. La vente d’options non couvertes comporte des risques particuliers qui exposent le Portefeuille à des pertes potentiellement importantes.
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