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août 27, 2019
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Dans la mesure où les droits de douane augmentent mécaniquement le coût des marchandises, ils devraient également entraîner une hausse du taux d’inflation. Pourtant, depuis que la guerre commerciale sino-américaine a débuté, l’inflation a baissé aux États-Unis
Pourquoi les droits de douane n’ont pas stimulé l’inflation
Pour expliquer ce paradoxe manifeste, nous avons analysé les forces en présence. Nous avons constaté un antagonisme entre d’une part l’impact clairement inflationniste des droits de douane et d’autre part leur effet déflationniste indirect, via le ralentissement de la croissance mondiale qu’ils ont entraîné, l’appréciation du dollar américain et le recul de la demande en matières premières.
Les premiers droits de douane ont été mis en place par l’administration Trump en mars 2018. Jusqu’à présent, 250 milliards de dollars de droits de douane ont été instaurés. Résultat, la part de la Chine dans le total des importations américaines est passée de plus de 20 % (historiquement) à 17,5 %.1 Fin 2018, plus de 46 % des importations chinoises étaient surtaxées.
Et pourtant, l’inflation (officielle et sous-jacente) aux États-Unis est en repli depuis juillet 2018. La tendance est particulièrement marquée pour l’inflation globale (Graphique 1), qui est retombée à 1,6% en juin 2019.2
Source: Datastream, données au 30 juillet 2019
Dans un coin : les droits de douane et la croissance des salaires
En comparant la variation en glissement annuel (GA) des prix à l'importation, on observe que le prix après dédouanement payé par les importateurs américains a en fait bondi après la mise en œuvre de chaque vague tarifaire, tandis que les secteurs non taxés n'ont pas connu de hausse soudaine des prix. Selon une étude récente3, les prix manufacturiers américains ont augmenté de 1,1 % en 2018 en raison des taxes douanières, via deux canaux :
Parallèlement, la croissance des salaires accélère depuis 2016 en raison des tensions sur le marché du travail. L’indice du coût de l’emploi affiche une croissance proche de 3 % en GA, son niveau le plus élevé depuis la crise financière mondiale. Toutes choses étant égales par ailleurs, cette tendance devrait également contribuer aux pressions inflationnistes.
Dans l’autre : la vigueur du dollar et la faiblesse du pétrole
La vigueur du dollar américain et le repli des prix du pétrole ont contrebalancé les pressions inflationnistes des droits de douane et de la croissance des salaires. L’indice du dollar américain (DXY) est en hausse de 5,9 % par rapport au mois de juin 2018.
Dans le même temps, le prix du pétrole brut WTI (West Texas Intermediate) est en repli de 17,4 % depuis la fin juin 2018. Sa phase baissière la plus marquée est intervenue au quatrième trimestre 2018 dans le sillage de la diminution des anticipations de croissance (Graphique 1).
Les conséquences inflationnistes des droits de douane ont également été étouffées en partie par l’absence des biens de consommation dans les deux premières vagues de droits de douane et par leur poids limité (25 %) dans la troisième. La plupart des droits de douane étant appliqués aux biens intermédiaires, qui sont souvent des composants de biens finis, les producteurs ont pu protéger les consommateurs en absorbant une partie de la hausse des prix.
Malgré l’augmentation de leurs prix, les biens intermédiaires ne représentent qu’un pourcentage modeste de l'indice des prix à la production (IPP). Les prix des services, qui représentent 60 % de l’IPP aux États-Unis, sont restés étonnamment stables. Les prix à l'importation aux États-Unis, qui sont très corrélés à l’IPP chinois, étaient en baisse de 2,0 % sur un an à la fin juin 2019 (Graphique 2). Le faible niveau de l’inflation importée a également tendance à peser sur l’IPP global de la première économie mondiale (Graphique 3).
Source: Bloomberg, Datastream. Données au 30 juillet 2019.
Source: Bureau of Labour Statistics, données au 30 juillet 2019.
La baisse des prix à l’importation aux États-Unis est due à plusieurs facteurs :
Dans ce contexte, la capacité de résistance de la consommation américaine a également été renforcée par la faiblesse du chômage américain et l’augmentation globale des salaires. De manière indirecte, les États-Unis peuvent se dire chanceux car le ralentissement de la croissance mondiale (qui a contribué à la déflation de l’IPP) et la vigueur de leur devise ont permis d’atténuer l’impact des droits de douane.
Et maintenant ?
Sans rebond de la demande industrielle, l’impact des droits de douane sur l’inflation restera probablement faible. En outre, les dernières statistiques 2008. L’activité industrielle allemande est retombée à un plus bas niveau sur sept ans et l’indice PMI manufacturier a touché 43,1 en juillet.
Les marges des entreprises commencent à pâtir de l’augmentation du coût de la main d'œuvre et des facteurs de production. Après avoir enregistré pendant des années des marges généreuses proches, voire supérieures, à 20 %, le potentiel de hausse semble désormais très limité (Graphique 4). Malgré des marges élevées en début d’exercice, certaines entreprises de l’indice S&P 500 ont fait état de pressions sur leurs marges liées à l’augmentation des coûts de la main d'œuvre et des facteurs de production dans leur publication de résultat du 2ème trimestre 2019.4
Les performances sont fournies à titre indicatif seulement et ne sont pas destinées à illustrer la performance d’un investissement spécifique.
Source: IBES, données au 30 juillet 2019.
Pour protéger leurs marges, les entreprises ont deux options : elles peuvent augmenter leurs prix si elles ont confiance dans l’avenir ou alors réduire leurs coûts. Si l’on se fie aux dernières données des indices PMI, à la confiance des entreprises et aux prévisions relatives aux dépenses d’investissement, c’est plutôt la seconde option qui semble la plus probable à court terme.
Une Fed conciliante et autres forces à l'œuvre
Si aucun droit de douane n’avait été appliqué, la croissance aurait été bien plus vigoureuse, l’inflation plus élevée et la Fed ne serait pas en train d’assouplir sa politique. Ainsi, malgré leur impact directement inflationniste, les droits de douane ont également eu un effet déflationniste indirect en ralentissant la croissance.
Les investisseurs espèrent que la politique accommodante de la Fed incitera les entreprises à réinvestir et que cela réduira les pressions déflationnistes actuelles. Et Le président Trump ne cesse de réclamer de manière assez agressive à la Fed un assouplissement de sa politique, en dépit de son indépendance. La prochaine élection présidentielle américaine pourrait également influencer la trajectoire de la politique budgétaire. Si la croissance économique demeure atone, le gouvernement sera incité politiquement à prendre des mesures de relance budgétaires.
La vigueur du dollar américain a pesé sur la croissance. La dévaluation de la devise chinoise visant à compenser les droits de douane a contribué à la vigueur du dollar américain. A terme, deux autres facteurs pourraient exercer des pressions haussières importantes sur le billet vert : les incertitudes entourant le Brexit et la probabilité croissante d’une récession en Allemagne. La Fed devrait être en mesure de contrebalancer la situation en procédant à plusieurs baisses de taux.
Un rebond du prix du pétrole, qui avait atteint un plus bas l’année dernière, pourrait également freiner la croissance. L’activité manufacturière reste léthargique, mais un choc sur les prix via le pétrole (par ex. si les tensions avec l’Iran augmentent) est toujours possible.
La croissance des salaires ne sera probablement pas source d’inflation sauf si l’économie américaine accélère. Enfin, si la croissance accélère, les entreprises devront renforcer leurs investissements pour répondre à la demande. Les pressions sur les marges pourraient alors les contraindre à répercuter l’augmentation des coûts sur les consommateurs, plutôt que d’en absorber eux-mêmes une partie.
Un risque d’antagonisme accru
Dans des conditions normales, l’augmentation des droits de douane et des salaires renforce les anticipations inflationnistes. Cette augmentation a bel et bien renforcé les pressions sur les prix, mais celles-ci n’ont pas été suffisantes pour compenser la faiblesse de la croissance mondiale (et chinoise notamment), le recul du pétrole, la fermeté du dollar et l’absorption intentionnelle des hausses de prix des biens intermédiaires par les producteurs. Ces facteurs pourraient être contrebalancés par un assouplissement de la politique de la Fed et un programme de relance électoraliste.
La baisse des taux initiée par la Fed pourrait donc présenter des risques futurs. En règle générale, les conséquences économiques des décisions de la Fed se font ressentir avec un décalage de 12 à 18 mois. Dans l’intervalle, certains des facteurs qui freinent l’inflation pourraient se dissiper, voire s’inverser. Si la Fed prend des mesures excessives pour répondre à l’atonie actuelle de l’inflation, elle pourrait être obligée de faire machine arrière.
Et le gagnant est... . .
À court terme, nous pensons que les forces limitant l’inflation vont prendre le dessus et maintiendront l’inflation entre 1,6 % et 2,0 %. La menace récente du président Trump d’imposer un droit de douane de 10 % sur les 300 derniers milliards de dollars d’importations chinoises a fait courir le risque d’une répercussion plus rapide de l’inflation puisque 60 % de ces importations concernent des biens de consommation A l’inverse, les dernières statistiques macroéconomiques continuent à faire état d'une forte tendance déflationniste des prix à la production (l’IPP a reculé de 0,3 % et de 0,6 % en GA en juillet en Chine et au Japon, respectivement). Pour l’heure, le choc déflationniste sur la demande prend toujours le dessus sur l’impact inflationniste des droits de douane. Cela dit, les tensions liées aux droits de douane ne vont probablement pas disparaître mais plutôt augmenter et baisser dans des proportions importantes.
Compte tenu de ces tendances, du manque de catalyseurs au niveau des fondamentaux et d’un possible choc sur la confiance des entreprises, nous préférons conserver un positionnement défensif avec une exposition relativement faible aux actions.
Bien que les investisseurs n’apprécient pas particulièrement les droits de douane, leur impact inflationniste n’en reste pas moins très modeste en raison des autres dynamiques à l'œuvre.
Considérations sur les risques
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http://www.nber.org/papers/w25672
sur les prix et la protection sociale aux États-Unis. mars 2019.
foi.